Page:Fargue - Le Piéton de Paris, 1939.djvu/137

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de « pornos » empêchent de dormir.

Du temps de l’Exposition des Arts décoratifs, quand Poiret avait encore son mot à dire, quand le pittoresque n’était pas exploité par les marchands de fonds et que le chanteur des rues n’était pas un indicateur, on trouvait rue de Lappe de jeunes éphèbes aux ongles douteux, aux chandails reprisés et aux joues fraîches, qui vous dérobaient délicieusement votre pochette en murmurant des « mon tout petit, ma mignonne, ma fleurette », à vous réchauffer l’ennui… Des hommes semblaient avoir vu le jour entre le pernod et la cerisette de ces bouges libres comme champignons en clairière. Aujourd’hui, « le Conseil Général » lui-même serait derrière les hors-la-loi et les hors-la-morale que les gens oseraient à peine s’en étonner…

Mais la prospérité est sœur du rationalisme. Tous ces cafés sont pleins. Trois fois de suite, on nous introduit presque de force entre des accouplements de servantes et de receveurs de tramways. On nous pousse vers des banquettes où la voyoucratie s’expose en famille. Nous lorgnons en passant toutes les boutiques. Les limonadiers se pressent sur le seuil de leurs portes et vous interpellent comme les anciens Cosaques de la rue Pigalle : « Dites, monsieur, vous venez pour la curiosité ? » Quelques mois encore, et l’on parlera anglais. Des employés de Cook-Wagons-Lits porteront à leurs lèvres ces cornets de mica par où s’éructent leurs vociférations érudites. Déjà, les vrais « hommes » se réfugient