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JEAN-PAUL

On lui remit une lettre qui venait précisément de Jean-Paul. Il monta aussitôt à sa chambre et l’ouvrit.


Saint-Raphaël, 15 mai 19**


Mon révérend et cher Père,

Vous savez sans doute maintenant mon grand malheur. Si, au moins, vous aviez été là pour me soutenir quand le coup m’a frappé ! Comment vous dire mon arrivée ici ? Cela ne se décrit pas. Avoir quitté sa mère au Jour de l’an, quand elle semblait en bonne santé, l’avoir embrassée en pressentant déjà la hâte de la revoir, et puis la retrouver dans une tombe !

Je vous écris de ma chambre, en haut. Je n’ose plus descendre avec les autres. J’essaie d’évoquer tous vos conseils, afin de trouver la force de passer à travers cette épreuve. Que ferai-je désormais ? Maman n’est plus là. Ayez pitié de moi, mon Père. Vous m’avez souvent parlé de sacrifice, mais vous ne m’avez pas dit que la Providence m’en demanderait un semblable. Expliquez-moi donc pourquoi le Dieu que vous proclamez si bon me fait tant de mal. Je ne comprends rien. Je suis perdu. Je tends vers vous mes pauvres mains meurtries. Je ne sais plus que dire et je ne suis plus capable d’écrire…


En effet l’écriture chevauchait sur les dernières lignes. La lettre n’était pas signée. Jean-Paul avait oublié d’y mettre son nom. Mais une coulisse d’eau, une larme, était sa signature la plus