Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/168

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caresses et de gâteries, une vie durant laquelle votre mari, oubliant sa mission chrétienne d’être votre tuteur et votre guide vers le salut, ne songerait qu’à s’agenouiller à vos pieds. Eh bien ! non, cette vie n’est pas possible, car Dieu l’interdit.

Autrefois, Alice Dax eût baissé la tête. Mais les temps étaient changés, plus changés peut-être qu’elle-même ne l’eût cru.

— Père, – fut la réplique hardie, – père, êtes-vous bien sûr ? J’en ai vu, des gens qui vivaient en s’aimant de toutes leurs forces, qui ne vivaient que pour s’aimer… Et je suis sûre que ces gens-là n’offensaient pas le bon Dieu…

L’abbé Buire, soudain violent, posa sa main droite sur ses Heures.

— Les pharisiens semblaient blancs comme neige, et cependant le Seigneur les a maudits, parce que leur plâtre hypocrite ne renfermait que de la pourriture. Ceux qui ne vivent pas selon la loi de Dieu offensent Dieu, et leurs soi-disant vertus terrestres ne sont qu’un peu de poussière blanche. Le royaume du ciel n’est pas pour eux !

Mademoiselle Dax, se parlant à elle-même, répéta comme en rêvant :

— Le royaume du ciel…

— Et sur cette terre même, continuait le confesseur avec autorité, il n’y a de bonheur qu’en Dieu. Hors de Lui, le péché empoisonne toutes les fausses joies qu’on se figure découvrir. Ces joies-là sont comme les fruits tombés trop tôt de l’arbre : ils paraissent