Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/200

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et la plage ne bruissait point. Pourtant, l’atmosphère immobile vivait, et c’était comme du vent qui se fût magiquement arrêté, sans cesser de tressaillir. Un silence formidable emplissait toute la nuit ; et l’odeur puissante des flots envahissait le ciel et la terre. Dans le firmament absolument pur, dix mille constellations étincelaient.

Ceux qui regardaient, accoudés côte à côte sur la balustrade de pierre, subirent peu à peu la paix souveraine qui entrait dans leurs âmes tumultueuses, et les subjuguait irrésistiblement. Le temps coulait si fluide qu’ils ne savaient plus s’ils étaient là depuis une minute ou depuis une heure. Et d’instant en instant, leur querelle s’éloignait d’eux, se rapetissait, s’enfonçait dans le passé, devenait minuscule et falote. Ils ne se souvenaient plus. À la fin, ils se rapprochèrent. Leurs épaules frémirent en se touchant. Et le bras de l’amant retrouva la taille de la maîtresse. Alentour, la nuit victorieuse régnait.

Ils demeurèrent très longtemps encore, leurs joues chaudes appuyées l’une contre l’autre, et la même admiration religieuse gonflant à la fois leurs deux poitrines. Puis, lentement, le désir monta entre eux, et ils se troublèrent en sentant leurs doigts entrelacés se serrer.

Leurs yeux s’étaient levés, ensemble, vers les étoiles. Ensemble, leurs regards se rencontrèrent sur un astre très bleu, qui scintillait si fort que son reflet marquait la mer d’une longue ligne tremblante.

— Sirius… — murmura Fougères.