Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/44

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Tout de suite, on passa dans la salle à manger.

— Et l’ami Bernard ? – questionna M. Gabriel Barrier.

L’ami Bernard, las d’attendre au salon, était allé s’asseoir à table.

— J’ai vu son palmarès, – déclara M. Dax. – Il aura cinq premiers prix et deux seconds.

— C’est un gaillard ! – s’enthousiasma M. Barrier.

Il embrassa sur les deux joues le susdit gaillard, lequel imitait la modestie à s’y méprendre.

Et tout le monde s’assit.


M. Gabriel Barrier, docteur en médecine, – cabinet de consultation rue du Président-Carnot, tous les jours de deux à quatre, – avait trente ans, six pieds deux pouces, et une barbe blonde qui floconnait plus bas que son estomac. Beau d’une beauté olympienne, et découpé comme un athlète de foire, il eût joué les héros d’aventures plus au naturel que les héros de romans, – Porthos mieux que Tircis. Les deux rôles ont de quoi plaire aux jeunes filles. Mais M. Barrier dédaignait l’un et l’autre. Médecin, il faisait fi de ce que la médecine comporte quelquefois d’héroïque ou de chevaleresque, et proclamait sans vergogne que les guérisons sont un moyen, et les honoraires une fin. Fiancé, il jugeait politique de faire sa cour au père et à la mère plutôt qu’à la fille. Mademoiselle Dax, d’ailleurs, n’avait pas l’outrecuidance de s’en plaindre, – trouvant déjà très beau que le docteur Gabriel Barrier, ex-interne des hôpitaux de Lyon, voulût bien la