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VIII


Alice, ma fille, un peu de musique, – ordonna madame Dax.

Alice, obéissante, se mit au piano.

— Un cigare, papa Dax ? – proposait le docteur. – Nous fumerons à côté en écoutant un petit air…

Madame Dax ne supportait pas le tabac au salon.

On fit donc deux camps ; on faisait deux camps tous les soirs : les femmes ici, avec leur piano ou leur ouvrage ; les hommes là-bas, avec leur cigare et leur cognac ; – à la turque, haremlick et sélamlick. – La soirée se traînait toujours ainsi, musulmane, si j’ose dire, jusqu’à onze heures et plus. Et ce n’était que peu de temps avant le bonsoir qu’on se réunissait pour un bout de causerie, histoire de prendre poliment congé les uns des autres.

— Mademoiselle Alice, – cria le fiancé en fermant la porte, – je suis tout oreilles. Quelque chose de gai, n’est-ce pas ?

Mademoiselle Dax feuilletait la musique de son casier. Il n’y avait pas grand’chose de gai dans ce casier. C’étaient des romances, des airs d’opéra, des sélections, des valses lentes, – du sentimental. Point de musique classique d’ailleurs : la famille Dax n’aimait pas la musique classique, et mademoiselle Dax elle-même préférait les mélodies bien compréhensibles, « les airs ».