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à la brunante.

Bientôt un cotillon remplaça la gigue mourante ; puis ce fut le tour d’un reel, puis d’un quadrille, puis d’une danse ronde, et Rose infatigable, en bonne maîtresse de maison, passait du bras de Thomas Toupin à celui de François Bélanger, de Gervais Lalonde à Germain Lambert, sans fatigue apparente, jusqu’à l’heure du réveillon, ainsi que l’exige l’étiquette canadienne-française.

Mais dès que les nombreux invités furent confortablement installés autour de la table ployante, et que les chansons à boire et les santés se prirent à circuler de convive à convive, Rose, sous un prétexte quelconque, pria sa tante Marguerite de faire les honneurs du logis, et revint auprès de Jules qui, debout dans un des angles de la salle, regardait distraitement le salon vide.

— Je me sens fatiguée, lui dit-elle, et, avant de monter à ma chambre, j’ai tenu à venir vous dire bonsoir ; j’espère pouvoir me glisser inaperçue au milieu de toute cette gaieté qui monte.

— Inaperçue ! vous êtes plus que cruelle, Rose, répliqua Jules, vous êtes une petite égoïste, car vous semblez toujours oublier que je suis là.

— Méchant cousin ! fit Rose en lui présentant son front à baiser : bonsoir ! à demain !

Hélas ! le lendemain devait être triste, bien triste, et, puisque j’ai entrepris de raconter cette navrante histoire, il me faut maintenant aller jusqu’au bout.