Page:Faucher de Saint-Maurice - Promenades dans le golfe Saint-Laurent, 1886.djvu/121

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
119
LE GOLFE SAINT-LAURENT.

voir le phare. Il a été construit en 1855, et a la forme d’une tour blanche, circulaire, haute de cent-dix pieds. D’après le livre bleu de la marine, ce phare est toujours ouvert au sud de la pointe au Cormoran, et est visible entre les points sud-ouest-quart-nord et est. Il est bâti sur une pointe très basse qui vue d’une certaine distance en mer, s’efface complètement pour ne laisser apercevoir que la tour. Celle-ci, par un curieux effet d’optique, ressemble alors à une voile sur l’horizon.

Notre aimable camarade de route, M. Gagnier, devait nous quitter ici. Avant de nous dire adieu, il voulut nous faire les honneurs de son domaine, qui ressemble plutôt à une ferme modèle qu’à l’emplacement d’un phare. Nous sautâmes donc ensemble dans la baleinière ; et bientôt nos vigoureux rameurs nous débarquèrent sur l’étroite lisière de grève qui sépare la mer d’un petit lac d’eau douce. Le voyageur, en parcourant cette partie de l’Anticosti, rencontre assez fréquemment ces lagunes, peuplées d’anguilles. Elles sont creusées dans une vaste tourbière qui, d’après M. James Richardson, s’étend le long des terres basses de la côte sud de l’île, depuis la Pointe-aux-Bruyères jusqu’à huit ou neuf milles de la pointe sud-ouest. Cette plaine continue de tourbe a plus de quatre-vingts milles d’étendue. Sa largeur moyenne est de deux milles ; elle présente une superficie de plus de cent-soixante milles carrés, et les soudages lui ont donné, une épaisseur de trois à dix pieds. En y pratiquant des canaux, on pourrait aisément l’assécher et la rendre propre à l’exploitation. C’est, autant que je sache, ajoute M. Richardson, la plus vaste tourbière du Canada. On y a tracé une route qui conduit