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LE GOLFE SAINT-LAURENT.

nord et à Belle-Isle — il annoncera au monde le passage des navires, donnera les nouvelles qui serviront de bases à d’importantes études météorologiques, et indiquera aux pêcheurs et aux habitants de la côte, les pérégrinations du hareng, du maquereau, de la morue et du loup-marin, ainsi que l’endroit où il viendra se porter pour leur faire une pêche ou une chasse fructueuses.

Il était cinq heures du soir, lorsque le premier tour de l’hélice nous arracha à la contemplation du Rocher-aux-Oiseaux. Le soleil était chaud : et pendant que nous courions sur Brion pour y passer la nuit, le second rocher se montrait à nous sous les apparences les plus fantastiques. Il était à un demi-mille sous le vent ; et tandis que celui que nous quittions prenait dans l’éloignement la forme d’une tour Martello, celui-ci ressemblait à un bastion, à travers lequel on aurait percé une porte de guerre, arche profonde de trente pieds, large de cinquante, et haute de vingt. Puis, à mesure que le steamer avançait, il perdit cette forme, pour affecter celle d’une pyramide, n’ayant guère plus de vingt pieds de superficie. Fière et inaccessible, comme le bonnet phrygien de la liberté, elle allait se perdre dans les profondeurs du ciel bleu.

Après les rudes labeurs de la journée, nos hommes avaient mérité de prendre une nuit de repos, et le lendemain, quittant plus frais et plus dispos le petit havre de Brion, nous faisions route vers les îles de la Madeleine. Depuis assez longtemps, le Napoléon III filait à toute vapeur, sur le dos d’une mer calme qui l’entraînait dans ses vagues longues et presqu’insen-