Page:Faugere - Eloge de Pascal - A 10644.pdf/29

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 25 )

à tel point que lui, qui avait si puissamment concouru à détruire les préjugés répandus de son temps sur les causes et la nature du vide, il n’admettait pas comme certain le mouvement de la terre sur la foi de Copernic et de Galilée[1] ; et cependant, ayant une activité d’esprit qui ne lui permettait pas de rester indifférent aux grands problèmes de la destinée humaine, Pascal n’employa pas ses immenses facultés à créer un système de plus. Doué de l’imagination à la fois la plus vive et la moins romanesque qui fut jamais il accepta la révélation comme le plus sûr asile contre le doute et les conceptions chimériques et s’y attacha de toute la force de sa raison et de sa volonté.

Naturellement dogmatique, redoutant le scepticisme, autant au moins que l’erreur même, Pascal cherche à tout prix une conclusion : c’est le procédé du grand géomètre ; c’est le besoin de son âme. Il a l’infatigable et sublime désir de croire plutôt que la croyance réelle et vivante. Sa foi ne vient pas du sentiment ; elle est avant tout l’œuvre laborieuse de la volonté ; elle s’entoure d’arguments, et emprunte ses armes à la raison pour vaincre la raison elle-même. Ce n’est pas une jouissance paisible du cœur ; c’est un effort de l’esprit contre lui-même, une lutte suspendue sur le doute comme sur un abîme.

Pascal a lui-même dépeint la situation de son âme dans

  1. Voy. tom. II et tom. IV. — Condorcet, dans une de ses notes sur les Pensées, attribue au fanatisme, ou à la crainte de choquer le pouvoir qui condamna Galilée, le doute exprimé par Pascal sur le mouvement de la terre. C’est une erreur manifeste : Pascal, quelque extraordinaire que cela puisse paraître, ne croyait pas à la vérité du système de Copernic et de Galilée. Plusieurs passages de ses œuvres le prouvent jusqu’à l’évidence.