Page:Faugere - Eloge de Pascal - A 10644.pdf/33

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 29 )

Nous oserons le dire, parce que la mémoire d’un tel homme peut tout entendre : pris dans son ensemble, le livre des Pensées est l’œuvre d’un esprit qui cherche la vérité, plutôt que celle d’un esprit qui l’a trouvée. Souvent, durant de longues heures, nous sommes resté courbé sur ces pages qui ont le pouvoir de jeter l’âme dans d’involontaires méditations. Nous admirions la force d’argumentation avec laquelle Pascal presse tour à tour les prophètes, les philosophes, et surtout les passions et les sentiments du cœur humain, et les fait témoigner en faveur des vérités révélées. Mais alors qu’ayant parcouru toutes les parties de ce temple inachevé, qu’ayant admiré le génie de l’architecte qui avait élevé l’édifice sur un plan si imposant et dans un style si majestueux et si sévère, alors que nous cherchions le Dieu et l’autel afin de recueillir et de consoler notre âme dans la prière, il nous semblait que nous ne les trouvions pas, que nous n’entendions pas les hymnes joyeux qui attestent la divine présence, et que l’encens du sacrifice n’arrivait pas jusqu’à nous ; il nous semblait enfin que nous sortions froids et troublés de cette demeure où le nom de l’architecte était plus visible que celui de Dieu.

Voltaire eut un jour la fantaisie de pénétrer dans cette solitude, et, remarquant çà et là quelques images chargées de tristesse et d’austérités, il se crut dans un lieu consacré à la superstition, et il en sortit en riant, sans en comprendre la majesté.

Tâchons d’être plus juste, et, sans exagérer la gloire de Pascal, la méconnaissons pas. Après le spectacle de l’homme qui possède humblement les lumières de la religion et de la philosophie, et les répand avec sérénité autour de

5