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Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 2.djvu/117

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EVA
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prononciation douce et agréable. C’est par euphonie que l’on dit : ira-t-il pour ira-il ou va-t-il pour va-il, mon épée pour ma épée ; etc…

Le mot euphonie s’emploie également pour désigner le son d’une seule voix ou d’un seul instrument ; le mélange de plusieurs voix ou de plusieurs instruments s’appelle une symphonie.

L’antidote de l’euphonie est la dissonance et lorsque l’on est appelé à causer surtout en public il est indispensable de bien choisir ses mots et de bien faire attention de les joindre les uns aux autres le plus élégamment possible. Rien n’est plus désagréable qu’un assemblage dissonant de mots qui rebute l’auditeur et ne lui permet pas de saisir, de comprendre et de partager la pensée de l’orateur.


ÉVANGILE n. m. (du latin evangelium ; du grec euagelion, bonne nouvelle). Doctrine du Christ. On appelle « évangile » les livres attribués à certains apôtres ou disciples du Christ et qui retracent sa vie, de sa naissance à sa mort.

Durant les premiers siècles de l’Église chrétienne, il parut un grand nombre d’évangiles « et les chrétiens des diverses villes écrivirent leurs évangiles qu’ils cachaient soigneusement aux autres juifs, aux romains, aux grecs ; ces livres étaient leurs mystères secrets. Chaque petite société chrétienne avait son grimoire qu’elle ne montrait qu’à ses initiés » (Voltaire, Dieu et les Hommes).

Fabricius nous cite 35 évangiles ; Voltaire déclare qu’il y en eut plus de cinquante d’une certaine importance ; mais, de tout cet amas de littérature indigeste et ridicule, quatre livres seulement furent reconnus par l’Église. Ce sont les évangiles selon saint Luc, saint Mathieu, saint Marc et saint Jean.

Les évangiles non officiels, c’est-à-dire non reconnus par l’Église sont dits : apocryphes ; les autres sont ceux que l’on appelle les évangiles canoniques et sont à eux seuls un suffisant tissu de contradictions, d’aberrations et de mensonges.

Il est douteux que les évangiles que l’on attribue à Luc, Mathieu, Jean et Marc soient réellement leur œuvre. Mathieu fut un des apôtres du Christ ; Jean, fils de Zébédée, un des douze apôtres, fut également un disciple de Jésus ; saint Marc et saint Luc vécurent également les premiers âges du christianisme. Tous quatre furent en un mot des contemporains du Christ et cependant de telles contradictions fondamentales se glissent dans leur relation de la vie de Jésus qu’il est impossible que les évangiles canoniques soient écrits par des hommes ayant vécu, vu, partagé la vie de l’ « Homme Dieu ».

Du reste, jusqu’au troisième siècle, les dits évangiles furent non seulement méconnus mais inconnus et nous pensons qu’il est plus sage de croire qu’ils furent composés d’anecdotes recueillies par des théologiens de la fin du deuxième siècle de notre ère et qu’on les attribua à des contemporains du Christ pour leur donner plus de force.

S’il n’est d’aucune importance historique de rechercher et de connaître la généalogie de Jésus, au point de vue religieux c’est d’une importance primordiale, si Jésus est le Messie, « promis depuis des siècles par les prophètes ». C’est sur ce point que repose toute la religion chrétienne.

En effet, selon les prophéties bibliques, le Messie doit descendre en lignée directe du roi David et c’est pourquoi l’évangile de saint Mathieu tout comme celui de saint Luc cherche à décrire l’ascendance de Jésus. Or, nous nous apercevons que l’évangile pèche à sa base, car les évangélistes n’ont jamais pu démontrer que Jésus descendait du roi David.

Prenons par exemple le Protévangile attribué à « Jacques, frère du Seigneur ». (Mathieu, ch. I, v. 19) au verset IX il est dit ceci : « … Et le grand prêtre dit à Joseph : Vous êtes choisi par le sort divin, pour prendre la vierge du seigneur en garde chez vous. Et Joseph s’en défendait disant : J’ai des fils et je suis vieux, mais elle est très jeune ; de là je crains de devenir ridicule aux enfants d’Israël ». Et au verset xiii : « Au bout de son sixième mois, voici que Joseph vient de ses ouvrages de charpentier et, entrant dans la maison, il la vit enceinte et le visage abattu : il se jeta par terre et pleura amèrement disant : De quel front regarderai-je le seigneur Dieu ? Et quelle prière ferai-je pour cette petite fille, laquelle j’ai reçue vierge du temple du Seigneur et je ne l’ai pas gardée. »

Jacques était le frère de Jésus et nous voyons par ce qui précède que Joseph n’était pas l’époux de Marie, mais simplement son gardien. Et d’abord sur ce point les évangélistes sont d’accord à reconnaître que le Christ n’a pas été conçu par Joseph mais par la Vierge Marie et le Saint-Esprit.

Or les évangélistes et plus particulièrement saint Luc et saint Mathieu font bien descendre Jésus de David et d’Abraham, mais par Joseph ; seulement, alors que Mathieu compte cinquante-deux générations d’Abraham à Jésus, Luc en trouve cinquante-six. Et de suite une question se pose, simple à notre esprit : Si Jésus est le fils de Marie et du Saint-Esprit, il ne peut être le fils de Joseph et conséquemment il ne descend pas de David ; il n’est pas le Messie. S’il est le fils de Joseph, il n’a pas été conçu par le Saint-Esprit, et Marie n’est plus vierge, et Jésus n’est plus le fils de Dieu. De ce dilemme, l’église tâche de sortir en déclarant que Marie appartenait également à la tribu de David ; mais alors, pourquoi les évangélistes se sont-ils efforcés de démontrer que Joseph descendait directement de David ? Leurs recherches étaient vaines et inutiles ? Mystère, sans doute ? Naturellement.

Les évangiles sont si peu compréhensibles à la saine raison et fourmillent de tant d’absurdités que l’Église a cru devoir les commenter. Pourtant les commentaires ne détruisent pas ce qui est et conséquemment ne peuvent satisfaire que les croyants aveuglés par un fanatisme étroit, ou des imbéciles. N’est-ce pas la même chose ?

Pour l’individu avide de savoir et de vérité, l’explication des évangiles, canoniques ou non, sur la naissance, la vie et la mort de Jésus est trop enfantine pour faire croire en un Dieu et en son fils ; et si toutefois le Christ a existé — ce qu’il faudrait démontrer — nous pensons, avec Voltaire, que ce fut « un paysan grossier de la Judée, un peu plus éveillé que les habitants de son canton ».

S’il nous fallait reprendre le texte des différents évangiles et les commenter à notre tour, un ouvrage de plusieurs milliers de pages n’y suffirait pas. Nous nous contenterons de signaler brièvement quelques traits et quelques épisodes de la « vie de Jésus » qui nous paraissent particulièrement insensés et qui éveillent en nous le doute sur la valeur historique que l’Église accorde aux évangiles.

Mathieu nous dit (chap. II, v. 14) que, peu après sa naissance, Jésus fut emmené en Égypte par Joseph et Marie, et il ajoute (chap. II, v. 23) qu’après la mort d’Hérode, le petit Dieu fut ramené à Nazareth « afin que la prédiction des prophètes fût remplie ». Il sera appelé « Nazaréen ». Or, Luc, sur ce fait, dit absolument le contraire de Mathieu et prétend que l’enfant Dieu fut mené directement à Nazareth sans passer par L’Égypte.

D’autres évangiles signalent cependant le passage du « petit Jésus » en Égypte, et l’évangile de l’Enfance nous