A. Thierry : Réflexions sur l’Éducation (Librairie du Travail).
Ad. Ferrière : L’École active (Éditions Forum), La pratique de l’École active (Forum).
J. Dewey : Comment nous pensons (Flammarion).
H. Le Chatelier : Sciences et Industrie (Flammarion).
Dr Bridou : L’Éducation des sentiments (Doin).
P.-F. Thomas : L’Éducation des sentiments (Alcan).
G.-L. Duprat : L’Éducation de la volonté (Doin).
ÉDUCATION SEXUELLE. L’ensemble des moyens ayant pour objet de déterminer, chez les humains des deux sexes, des habitudes d’hygiène rationnelle et de prévoyance sociale, pour ce qui concerne les organes de la génération, et les fonctions de la reproduction. Cette éducation est d’une importance extrême, dont sont encore loin de se douter, au vingtième siècle, nombre de gens pour lesquels les choses de la sexualité ne représentent d’autre intérêt que celui qui s’attache à des sujets grivois. Ce n’est pas seulement la préservation individuelle et le bonheur conjugal qui sont en jeu, mais l’avenir de l’espèce et de la société. Pourtant, jusqu’à présent, cette partie si importante de l’éducation a été la plus négligée, on peut dire : la plus méprisée de toutes, par suite d’absurdes préjugés d’origine religieuse.
En présentant l’acte d’amour hors mariage comme une faute abominable, la nudité jeune et saine comme impudique, les organes de la génération comme honteux, et la volupté telle un divertissement d’enfer, la pudibonderie chrétienne n’a opposé aux excès qu’un faible correctif. Elle a favorisé principalement le vice solitaire, les déviations morbides, et la fourberie. Le rigorisme tout d’apparence qu’elle a engendré dans les mœurs n’a guère contrarié dans leurs ébats privés les gens des classes dirigeantes, mais causé, parmi les faibles et les sincères, une somme incalculable de souffrances inutiles, de remords injustifiés, de suicides et de crimes, à la fois pitoyables et grotesques.
Les données principales sur lesquelles se fonde l’éducation sexuelle, scientifiquement comprise, peuvent être résumées dans les propositions suivantes :
1o Moralités générales. — Il n’est pas, dans l’être humain, de fonction condamnable ni d’organes honteux. Ceux qui assurent la perpétuation de l’espèce ne sont pas moins dignes d’estime que ceux qui assurent la conservation de l’individu. Le désir charnel n’a pas pour origine le vice, mais les exigences physiologiques des organes reproducteurs lesquels, parvenus à maturité, réclament, à l’âge nubile, l’accouplement indispensable à la vie de l’espèce, comme les poumons et l’estomac réclamaient, dès la naissance, les aliments et l’air indispensables à la vie de l’enfant. Le vice n’est pas dans la recherche de l’accouplement à cause de la volupté qui en résulte, mais dans les excès qui peuvent en être la conséquence. Et l’on n’est fondé à prétendre qu’il y a excès que là où sont constatés médicalement, et comme effets durables : un affaiblissement sensible de l’intelligence, une moindre résistance de l’organisme, ou bien une dégénérescence de l’espèce.
Même lorsqu’il n’a pas pour but l’enfantement, l’amour sexuel, lorsqu’il ne nuit à personne, trouve dans le bonheur qu’il procure sa poésie et sa justification. Aimer d’amour sexuel, même sans l’assentiment de la magistrature et du clergé, n’est pas une faute, encore moins un crime. Les suites graves qui peuvent en résulter, particulièrement pour la femme, ne sont pas imputables à l’amour, mais bien à l’hypocrisie féroce et à l’organisation déplorable de notre société.
2o Hygiène individuelle et familiale. — Le mystère fait aux enfants, quant aux fonctions de la génération, a pour conséquence d’exciter leur curiosité, et de les amener à acquérir clandestinement, d’une manière incomplète et dangereuse, auprès de condisciples dépravés, les explications qui auraient pu leur être données scientifiquement, pour leur plus grand bien, en insistant sur le danger de certaines pratiques. Il appartient aux éducateurs d’instruire, progressivement et avec tact, les enfants et les adolescents. D’abord sur l’utilité de la propreté intime ; ensuite sur l’accouchement ; enfin, sur l’acte procréateur, les suites qu’il entraîne, et les dangers de contagion auxquels il expose.
La méticuleuse propreté des organes génitaux, grâce à des lavages journaliers, est une condition de santé. Pour l’enfant, parce que la négligence à cet égard est cause de démangeaisons qui occasionnent, à leur tour, de mauvaises habitudes. Pour les adultes, parce que ce manque de soins est éminemment favorable à la propagation des maladies vénériennes et de la syphilis. Être parfaitement net, des pieds à la tête, et pas seulement sur le visage et les mains, est — surtout dans les relations amoureuses — une clause élémentaire de respect de soi-même et des autres.
La propreté n’est pas toujours suffisante pour conférer l’immunité, en cas de rapports suspects ou d’accouplements de hasard. Pour obtenir le maximum de garanties, il faut lui adjoindre des moyens de préservation qui sont : l’usage d’un condom pendant l’acte, ou bien, après l’acte, et en cas de rupture du condom, le recours à des injections et lavages avec une solution antiseptique, auxquels on peut ajouter, par surcroît, mais d’une façon occasionnelle, sans excessive fréquence, l’usage de la pommade de Metchnikoff, ou quelqu’un des produits qui en sont dérivés.
Les maladies vénériennes et la syphilis ne sont pas des maladies honteuses. Ce n’est pas la débauche qui les engendre, mais l’infection. Celle-ci est favorisée par les contacts intimes au cours des ébats amoureux. Mais ces derniers ne sont pas indispensables à la transmission du virus, dont peuvent être victimes des personnes parfaitement chastes, et même des enfants nouveau-nés. Apprendre aux jeunes gens des deux sexes à se défendre contre ces maladies, dont les conséquences, lorsqu’elles ne sont pas soignées à temps, peuvent être fort graves pour l’homme, comme pour la femme, et leur progéniture, ce n’est pas pervertir la jeunesse, mais la prémunir contre un redoutable danger.
3o Procréation consciente. — Goûter le plaisir d’amour n’est pas une faute. Ce qui est condamnable, c’est de procréer bestialement, au hasard, sans souci de la santé ou de la sécurité de la mère, ni de ce que deviendront les enfants. La santé et la sécurité de la mère doivent être prises tout d’abord en considération : Il est des cas où, par suite soit de maladie, soit de malformation, la maternité comporte, pour la femme, un péril de mort, tout au moins de graves complications. D’autre part, dans notre organisation sociale où la maternité pauvre est si mal secourue, la venue d’un enfant, pour une femme abandonnée, ou bien sans ressources suffisantes, représente trop souvent : pour le nourrisson, la maladie et la mort ; pour celle qui le berce, l’acheminement vers la prostitution, le suicide, ou l’extrême misère. La liberté de l’amour, et la recherche d’un plaisir très légitime en soi, ne doivent point servir de prétexte au rejet de tous scrupules.
Les enfants ressemblent physiquement et moralement à ceux qui les ont mis au monde. Ils héritent de leurs qualités, mais aussi de leurs tares. Ils portent même l’empreinte des dispositions plus ou moins heureuses dans lesquelles se trouvaient les géniteurs au moment de la conception. Il ne faut donc point se mettre dans le cas d’avoir des enfants tant que l’on est malade,