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IDO
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-atr, qui tient de : sponj-atr-a, spongieux.

-e, qui a la couleur, l’aspect : tigr-e-a, tigré.

-ebl, qu’on peut : vid-ebl-a, visible.

-ed, ce que contient : bok-ed-o, bouchée.

-eg, augmentatif : bel-eg-a, superbe.

-em, porté à : venj-em, vindicatif.

-end, qu’on doit : pag-end-a, payable (à payer).

-er, qui pratique : dans-er-o, danseur.

-eri, établissement : distil-eri-o, distillerie.

-es, état, qualité : fort-es-o, force,

-esk, commencer, devenir : dorm-esk-ar, s’endormir ; pal-esk-ar, pâlir.

-et, diminutif : mont-et-o, éminence.

-estr, maître : skol-estr-o, maître d’école.

-ey, lieu affecté à : dorm-ey-o, dortoir.

-i, domaine, ressort : parok-i-o, paroisse.

-id, descendant : sem-id-o, sémite.

-ier, caractérisé par : reni-ier-o, rentier.

-if, produire : frukt-if-ar, fructifier.

-ig, rendre, faire : bel-ig-ar, embellir ; dorm-ig-ar, endormir.

-ik, malade de : ftizi-ik-o, phtisique.

-il, instrument pour : bros-il-o, brosse.

-in, féminin : frat-in-o, sœur.

-ind, digne de : kondamn-ind-a, condamnable.

-ism, doctrine : katolik-ism-o, catholicisme.

-ist, professionnel : pian-ist-o, pianiste.

-iv, qui peut : instrukt-io-a, instructif.

-iz, munir, garnir : vest-iz-ar, vêtir.

-oz, qui a ce que dit la racine : por-oz-a, poreux.

-ul, mâle : kat-ul-o, matou.

-ur, produit de l’action : skult-ur-o, (une) sculpture.

-uy, contenant : ink-uy-o, encrier.

-yum, petit ou jeune (animal) : boc-yun-o, veau.

En application, voici un texte en Ido qu’on déchiffrera facilement :

« L’experienco montras ke nula fluvio, nul a oceano, nula monto, pozas intel homi obstaklo tam granda kam du diferanta lingui. En la kongresi internaciona on uzas plura idiomi ed on komprenas apene l’unu l’altru. Se on volas tradukar libro vizanta omna populi di la mondo, on sakrifikas granda kapitali ed on obtenas rezultajo mizeroza. On bezonas organo internaciona por korespondar inter su sen jeno. Or nula linguo nacionala povas servar por tala rolo : 1, on ne obtenus voto konkordanta, pro ke omna populo elektus sua propra linguo e ne volus cedar ad altra ; 2, linguo nacionala ne esas facila mem por sua naciono, o1 ne esas do facila por altri. Or linguo nefacila havas nula chanco por divenar internaciona. En tala kondicioni restas, kom sole adoptebla, artificala linguo pro ke ol prizentas la du avantaji esar : 1, komplete neutra ; 2, extreme facila. »

Historique du mouvement Idiste. — La Délégation pour l’adoption d’une L. I. fondée en 1901, avait reçu l’approbation de 310 sociétés savantes et de 1.250 membres des Académies et Universités, lorsqu’elle élut, en 1907, le Comité International qui, au mois d’octobre, adopta en principe l’Esperanto, « sous réserve de certaines modifications », en cherchant à s’entendre avec le Lingva Komitato espérantiste. Mais, le 18 janvier 1908, Zamenhof refusa toute entente. Il fut alors procédé à la mise au point de la langue qui recueillit l’adhésion d’éminents espérantistes, tels que Charles Lemaire en Belgique, Schneeberger en Suisse, Ahlberg en Suède, Pfaundler en Autriche, Kofman en Russie, Lusaa en Italie, etc., ainsi que des partisans d’autres systèmes, tels que Schmit de Nurenberg, un des premiers espérantistes, passé ensuite à l’Idiom Neutral, et Bollack, l’auteur de la Langue Bleue. Le 29 mars 1908, Zamenhof ayant demandé de ne pas employer pour la langue le nom d’Esperanto (pour lui rendre hommage, elle était propagée sous le nom d’esperanto simplifié), on accéda

à son désir, et le nom d’Ido (pseudonyme sous lequel de Beaufront avait déposé le projet de réformes) fut adopté quelque temps après.

L’Ido continua de se répandre et de recruter des adeptes, à la fois parmi les espérantistes et parmi le public jusque-là indifférent. C’est ici qu’il faut signaler une épreuve à laquelle n’a été soumise aucune autre L. I.. De 1908 à 1913, toutes les propositions d’améliorations de l’Ido ont été présentées à la critique publique des adeptes dans Progreso, l’organe officiel de l’ « Uniono por la Linguo Internaciona ». Les 3.600 pages que constitue la collection des 80 fascicules de cette revue sont une mine inépuisable de remarques linguistiques pratiques permettant d’affirmer que la question a été examinée sous toutes ses faces, qu’aucun point n’a été laissé dans l’ombre. Les Idistes pensent donc que l’Ido n’a plus à craindre aucun concurrent, d’autant plus que, toujours prêt à accepter les améliorations, forcément très minimes, qu’on lui démontrerait évidentes, il ne peut être remplacé par un système meilleur, puisqu’il accepterait de s’incorporer les supériorités de ce système.

Le premier congrès en Ido devait se tenir à Luxembourg, en août 1914. L’immonde tuerie l’empêcha et il n’eut lieu qu’à Vienne, en 1921. Il fut suivi des congrès de Dessau, Cassel, Luxembourg et Prague. Inutile de dire que la seule langue employée est l’Ido, puisque c’est la seule qui soit commune à tous les congressistes.

L’Ido a reçu des applications dans tous les domaines. Certaines maisons de commerce l’emploient pour leur réclame internationale. Des dictionnaires techniques, tels que les Eléments de machines et outils usuels, de Schloman, ont été traduits en Ido. En 1924, un dictionnaire de 250 pages, uniquement consacré à la radio, a paru en Ido, avec définitions et explications en Ido. Du reste, plusieurs stations font des émissions en Ido, notamment celle de Kiew.

Dès 1909, des propagandistes de l’Esperanto dans les milieux ouvriers passèrent à l’Ido. Le groupe intersyndical idiste fut fondé et un cours, qui subsiste toujours, fut ouvert à la Bourse du Travail de Paris. Le mouvement se développa également hors de France et, en mai 1911, parut le premier numéro de Kombato, bulletin trimestriel d’ « Emancipanta Stelo », Union internationale des travailleurs idistes.

Chez les Anarchistes. — Comme il était à prévoir, les anarchistes, pour lesquels n’existe aucun dogme intangible, ni linguistique ni autre, furent les premiers à exercer leur esprit critique de libre examen dans ce domaine. Jusqu’en 1908, le « Grupo esperantista libertaria » propagea l’esperanto par des cours publics et par correspondance. Mais en 1909, gagné aux réformes, le groupe fut dissous. Quelques mois plus tard, le « Grupo libertaria idista » se forma et ouvrit, en novembre 1909, à la Coopération des Idées, le premier cours public d’Ido à Paris. En même temps, il annonçait dans les journaux anarchistes l’envoi de 2 manuels de 32 pages, l’un d’esperanto et l’autre d’ido, à tous les camarades désireux de connaitre la question. Le « Grupo libertaria idista », qui est la section anarchiste d’Emancipata Stelo, créa en 1922 son propre organe, Libereso, revue trimestrielle rédigée par des anarchistes idistes de tous pays.

En 1921, la résolution du Congrès anarchiste de Lyon sur la question de la L. I. fut la suivante : « Les anarchistes reconnaissent l’utilité d’une langue internationale (les avantages de celle-ci ne sont pas à exposer ici). N’étant pas capables d’apprécier en connaissance de cause la valeur respective de l’Esperanto et de l’Ido, ils se refusent à se prononcer sur l’adoption de l’un plutôt que de l’autre. Ils confient au prochain Congrès international anarchiste le soin de trancher cette question. »