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JACOBINS (Club des). Pendant la révolution française, les animateurs les plus fougueux et les plus exaltés de cette époque violemment tourmentée se réunissaient, à Paris, dans l’ancien couvent des jacobins, religieux se rattachant à la règle de saint Dominique. C’est à cette circonstance que ce club doit son nom. Durant plusieurs années, et notamment en 1792, 1793 et 1794, le club des Jacobins, qui comptait parmi ses membres les partisans les plus actifs et les plus passionnés de la république « une et indivisible », joua un rôle considérable, voire de premier plan. Composé des adversaires les plus acharnés de la royauté et des ci-devants », il poussa très loin — pour l’époque — les revendications et mesures, pour tout dire : le programme tendant à l’avènement d’un régime de liberté inconnu sous la Monarchie et d’égalité civique rendu impossible, avant 1789, par les survivances de la féodalité, par les privilège de la Noblesse et du clergé, par l’inégalité fortement accusée des castes.

Les jacobins soutinrent jusqu’au bout le comité de salut public qui donnait des ordres à la convention. Robespierre et Saint-just en furent les champions les plus ardents et, jusqu’au 9 Thermidor, celui qu’on désignait avec une craintive admiration sous le nom de « l’incorruptible » fut âprement défendu par ses amis jacobins.

Supprimée en 1794, après le 9 Thermidor, la Société des jacobins tenta de se survivre et reparut sous diverses formes. Mais son rôle fut de plus en plus effacé, jusqu’à ce que, frappée d’impuissance, elle fut définitivement dissoute 1799. Son nom reste attaché, dans l’histoire de la révolution française, aux décisions les plus hardies et les plus violentes et aux mouvements les plus populaires.


JACOBINISME n. m. Doctrine des Jacobins. Dans la langue courante de la politique, le mot Jacobinisme est appliqué à l’état d’esprit, aux procédés et au programme démocratique des partis dits « de gauche ». Le Jacobinisme, au commencement de ce xxe siècle, semble résumé dans ces deux formules : « Le progrès dans l’Ordre et la Liberté. — Ni réaction, ni Révolution. « Formules qui n’ont, en soi, aucune signification précise, étant donné que ce qui est Ordre pour ceux-ci est Désordre pour ceux-là, et que ce qui est Liberté pour les uns est licence pour les autres. Étant donné aussi que le mot Réaction peut être pris dans le sens de marche en arrière et le mot Révolution dans celui de marche en avant. Quand les partis de gauche affirment qu’ils repoussent et combattent avec la même force tout mouvement de réaction et de révolution, ils affirment, du même coup, qu’ils ne veulent ni reculer, ni avancer et, donc, que leur programme est de rester sur place. À ce piétinement s’oppose la vie, le cours des événements comportant sans cesse le mouvement et que le mouvement, politiquement parlant, implique nécessairement l’arrière ou l’avant, le passé ou le futur. Les partis politiques qui se proclament adversaires et de la Réaction (marche en arrière) et de la Révolution (marche en avant), ne sont et ne peuvent être que ceux dont

les chefs sont nantis du Pouvoir ou en escomptent la prise de possession en un laps de temps très court. Le présent satisfait leurs intérêts et ambitions ; il sourit à leurs projets de domination et ils voudraient que ce présent s’éternisât. Flattant la moyenne et la petite bourgeoisie actuellement fort nombreuse, ils agitent alternativement le spectre de la Réaction et de la Révolution, afin de maintenir et de consolider leur pouvoir sur la peur du sombre passé et de l’avenir incertain. Telle est la doctrine que professent actuellement les partis de démocratie qui, volontiers mais sans loyauté ni courage, se targuent de représenter de nos jours le Jacobinisme d’antan.


JACTANCE n. f. (du latin Jactancia, de jactare, vanter, proprement : lancer au loin). Hardiesse à se vanter, à se faire valoir. La jactance est le fait des individus qui, ayant de leur personne une haute opinion, sont tourmentés du désir de se faire prendre en haute estime par autrui. Un auditeur délicat et modeste se sent mal à l’aise quand il est appelé à entendre quelqu’un raconter les exploits dont il a été ou se prétend avoir été le héros. Rien que d’être narrées par celui qui se flatte de les avoir accomplies, les prouesses les plus méritoires et qui seraient dignes des plus vifs éloges, perdent la plus grande partie de leur valeur. Et lorsqu’il advient que celui qui parle pousse la jactance jusqu’à tirer vanité d’actes imaginaires, ce qui n’est pas rare, cette jactance devient méprisable.

L’homme de réelle valeur se garde soigneusement de toute jactance. Seul, un être brutal et grossier songe à se vanter de sa force musculaire ; seul, un demi-savant prend plaisir à étaler sa demi-science ; seul, un artiste de bazar a l’outrecuidance de parler avec emphase de son talent.

Le vrai savant est modeste ; il est incommodé par les flatteries immodérées dont il peut être l’objet, car plus il sait et plus il a conscience de ce qu’il ignore encore et lui reste à apprendre. Le véritable artiste se sent indigne du culte qui lui est rendu publiquement par ses thuriféraires, parce qu’il porte en soi la pensée de l’œuvre idéale et presque parfaite qu’il ne parvient pas à exécuter.

On entend des enmillionés parler avec jactance de leurs fabuleuses richesses. Ne sentent-ils pas l’indécence de pareils propos ? On entend des dictateurs, des ministres, des capitaines d’industrie, des chefs militaires se vanter de tenir sous leur main de fer des millions de sujets, des centaines de milliers de soldats ou des dizaines de milliers de travailleurs. C’est à croire que, chez eux, tout sens moral est aboli par le pouvoir dont ils sont revêtus.

La jactance est un des travers les plus détestables.


JALON n. m. Tige de fer, piquet, bâton, baguette on tout autre objet qu’on enfonce dans la terre pour prendre un alignement, marquer le tracé d’un chemin, indiquer le point où l’on en est, etc. Au figuré, jalon signifie un ou plusieurs pas faits dans une voie quelconque. La carrière dans laquelle on entre, à laquelle on consacre