croient vrais, mais parce qu’ils les savent faux et que leur excellent bon sens ne peut s’y laisser prendre. Ils sont ravis de laisser ce bon sens de côté pendant qu’ils font semblant…, mais c’est qu’en faisant semblant ils jouent la comédie, et plus la comédie est évidente, plus ils l’aiment. » Cependant, lors des jeux d’imagination, si au début l’enfant a conscience qu’il va « faire semblant » ou « faire comme si », dès « que l’action est engagée, chacun des acteurs, possédé par l’idée, oublie qu’il joue un rôle ; il s’incarne dans le personnage qu’il représente, et un moment arrive où il croit à l’illusion, où il métamorphose si bien les choses qui l’entourent et sa propre personnalité que la réalité disparaît pour lui devant la fiction. » (Jonckheere).
Depuis longtemps on a observé que, comme les peuples primitifs, l’enfant est animiste, il anime les choses : une poupée devient une petite fille, un manche à balai un cheval, et les jouets perfectionnés qui ne se prêtent pas à l’occasion d’imaginations diverses, qui ne peuvent figurer tour à tour des objets ou des êtres bien différents, sont bien vite délaissés pour des jouets plus modestes où l’enfant a plus à inventer et qui se prêtent mieux à sa fantaisie.
Les jeux intellectuels proprement dits « sont les jeux qui font intervenir la comparaison et la recognition, comme le loto et les dominos, le raisonnement, comme les jeux de dame, d’échec ou de bac ; la réflexion, comme les devinettes, les rébus, les jeux de patience. » (Vermeylen). Ces jeux sont prépondérants vers 10 à 12 ans, mais l’intérêt pour eux perdure ou renaît souvent, en se spécialisant, chez les adultes.
Il y a aussi des jeux affectifs où l’on prend plaisir à faire naître des émotions même désagréables : se donner des coups, se faire peur, faire des farces.
Certains jeux exercent la volonté : jeux de statue, de pigeon vole, réprimer l’envie de rire, ne pas fermer les yeux à l’approche brusque de la main, etc.
Il est également des jeux qui exercent des fonctions spéciales : jeux de lutte, de chasse, d’imitation, familiaux, sociaux, etc.
En se plaçant à un autre point de vue il est possible de diviser les jeux en : jeux individuels et en jeux collectifs.
Le jeune enfant est presque toujours individualiste dans ses jeux ; l’association de l’individualisme de l’enfant avec les premières tendances sociales l’amène à faire sa compagnie d’objets que son imagination anime.
Les rondes enfantines, les chansons mimées ne sont qu’une ébauche des jeux collectifs. Jusqu’à 6 ou 7 ans environ, les enfants préfèrent jouer seuls et même, s’ils jouent de compagnie, ils ne s’efforcent pas de s’adapter à leurs compagnons, ils ne coopèrent véritablement pas, leur jeu n’a pas de fonction sociale.
Plus tard, lors des jeux de colin-maillard, de barres, etc., il y a encore bien moins affinité sociale que groupement d’enfants autour d’une personnalité, d’un meneur, d’un chef de groupe qui s’entoure de faibles, d’inférieurs, de timides sur lesquels son ascendant est complet et qui exécutent ses volontés sans vouloir les contrecarrer.
Ce n’est que vers la puberté que les jeux sociaux deviennent prépondérants. C’est alors que l’adolescent développe ses tendances personnelles et ses goûts collectifs ; qu’il essaie, tout à la fois, de s’adapter à son milieu et d’adapter ce milieu à lui-même.
Lorsqu’un enfant vit trop exclusivement avec des adultes il risque ou d’être trop cajolé, c’est-à-dire soumis au régime de sa fantaisie, ou traité avec un excès de sévérité. Dans tous les cas la personnalité de l’enfant est imparfaitement formée. S’il joue presque uniquement avec des enfants plus jeunes, le danger est le même : habitué à voir les volontés des petits se plier sous la sienne il n’exerce pas sa propre volonté, il
L’idéal est évidemment que les enfants aient l’occasion fréquente de jouer avec des enfants de même âge. Dans ce cas du heurt des volontés naît un renforcement des personnalités. Il y a à ceci cependant quelques conditions : l’enfant doit avoir la possibilité de choisir entre divers groupes, sans cela il risque trop de devenir dépendant d’un chef de groupe. Il est désirable même que l’enfant change assez souvent de groupe. Le travail et le jeu en commun ont, en effet, pour résultat de tendre à l’uniformisation des personnalités, et le progrès humain, qui tend vers le développement des personnalités, ne se produit, à cet égard, que parce que les individus gardent la liberté d’adhésion à leurs groupements et, en fait, adhèrent à de multiples groupements : syndicalistes, politiques, coopérateurs, etc.
IV. — Rôle des éducateurs (parents et maîtres). — On ne se rend pas assez compte de l’importance des loisirs pour les enfants et les adolescents. Surtout pour les adolescents qui doivent passer des examens ou des concours il y a un abus évidemment. Presque toute leur vie est réglée — pas par eux — jour par jour, heure par heure. Croit-on que c’est ainsi qu’on les préparera à la vie ! Est-ce ainsi que l’on pense pouvoir développer leur initiative et leur personnalité.
Les loisirs sont nécessaires aux enfants et aux adolescents. « Nos enfants travaillent trop, trop et mal, écrit le Dr Boigey. Ils ne sont pas à leur place dans les écoles. Ils doivent y être immobiles, silencieux et attentifs : l’état de leurs organes le leur interdit. Les appareils du mouvement et de la voix ont besoin de fonctionner pour se développer. Les jeunes cerveaux sont incapables d’une attention soutenue. L’enfant ne reste tranquille que quand il est malade ou sur le point de le devenir. »
Il ne faut pas seulement des loisirs pour le meilleur état de la santé physique qui, ne l’oublions pas, influe sur la santé intellectuelle et morale, il en faut encore parce que les acquisitions de mémoire durables, la formation de l’esprit exigent du temps et du repos. Il en faut enfin pour permettre à l’enfant de jouer. Nous avons, dans les pages qui précèdent, montré l’utilité du jeu. Au risque de redire quelques idées que nous avons déjà exprimées nous croyons bon de citer encore ceci : « Le jeu est, au contraire, merveilleusement éducateur. On s’en persuade aisément, en passant en revue les jeux habituels des enfants. Peut-on, par exemple, jouer à pigeon-vole sans apprendre à faire attention, sans acquérir le contrôle du réflexe qui vous incite à lever le doigt quand il faut le laisser immobile ? Et Colin-maillard ? n’y doit-on pas faire preuve d’esprit d’observation et de déduction ? Et cache-cache ? que de prudence il faut y montrer, d’attention aussi et de décision rapide pour courir de sa cachette au but pendant le court moment où on a des chances de ne pas être vu…
…Et quelle source féconde d’observations pour l’ami des enfants, ces jeux divers, s’il s’y mêle en camarade. Les jeunes âmes s’épandent sans rien dissimuler d’elles-mêmes, tout à la joie de s’épanouir en pleine liberté. On ne connaît réellement un enfant que lorsqu’on s’est mêlé à ses jeux. Il faut, bien entendu, n’être plus pour lui le sage Mentor, mais l’ami qui prend autant de plaisir que lui-même. C’est une impression qu’on lui donne facilement, à condition que les petits êtres vous intéressent profondément et qu’on les aime. » (G. Lambert).
L’éducateur qui se rend compte de la nature et du rôle du jeu doit tout d’abord ne pas intervenir hors de propos dans les jeux des enfants.
« La mère, écrivent Demoor et Jonckheere, critique avec sévérité l’enthousiaste petite qui rassemble avec