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Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 2.djvu/708

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LOG
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offre des portes d’accès avec les autres pièces de la maison consistant en cuisine, chambres à coucher et, s’il y a lieu, bureau ou autre pièce spéciale. Cette maison ne comporte qu’un rez-de-chaussée. Si on le préfère, on peut n’avoir, au rez-de-chaussée, que la grande salle et la cuisine et mettre les chambres à coucher au premier étage. Mais ce qu’il faut toujours, c’est que chaque pièce soit largement ajourée et que l’air y circule, par quelques procédés que ce soit… »

Comme le vêtement, qu’il complète, le logement doit être au service de notre vitalité et de notre expansion. Et il ne peut favoriser nos joies que fugacement s’il nous enserre de jour morose et d’espace exigu, s’il prive nos organes, nous épuise et nous diminue… — Stéphen Mac Say.


LOGIQUE adj. et subs. fém. (grec logikos, de logos, discours, raison). D’interminables et vaines querelles ont mis aux prises les philosophes pour savoir si la logique est un art ou une science. Elle suppose la connaissance des opérations supérieures de l’entendement, se rapproche par là de la psychologie et, sous cet angle, apparaît comme une science. Mais, alors que la psychologie décrit ce qui est, la logique fixe ce qui doit être ; elle apprécie et son caractère normatif la rapproche singulièrement de l’art. « Science des sciences » ou « art de penser », elle se donne pour but d’orienter l’esprit dans la recherche du vrai, d’établir les règles de la pensée normale et scientifique. Deux parties la composent : la logique formelle, dont l’objet est l’accord de la pensée avec elle-même, la logique appliquée ou méthodologie qui vise à l’accord de la pensée avec son objet.

Longtemps la logique formelle garda une place prépondérante. Au ive siècle avant l’ère chrétienne, Aristote la porta presque à sa perfection ; au moyen-âge, avec les scolastiques, elle devint le cœur de la philosophie ; l’ambition suprême des doctes fut alors d’argumenter « en forme ». Les humanistes d’abord, puis les empiristes anglais et les rationalistes cartésiens réagirent heureusement contre cet excès. Sous le nom de logistique, elle fut approfondie, à la fin du xixe et à l’époque contemporaine, par des philosophes qui ont élargi et modifié l’œuvre d’Aristote, restée presque immuable jusque-là. Quant aux néo-scolastiques, pompiers sans esprit ou farceurs à la Maritain, ils en parlent avec onction, mais n’insistent plus autant que leurs chicaniers ancêtres.

A la suite du Stagirique, la logique formelle classique porte principalement sur le concept, le jugement, le raisonnement. Mais elle ne s’attarde ni aux opérations qu’ils exigent, ni à leurs rapports avec les données de l’expérience ; elle s’intéresse exclusivement à leur validité intrinsèque, à la présence ou à l’absence, de contradiction. C’est dire qu’elle est entièrement et uniquement commandée par le principe d’identité, loi souveraine de toute pensée raisonnable. Le concept, dont le terme est la traduction verbale, suppose un ensemble de qualités, c’est sa compréhension ; il s’applique à un ensemble d’êtres ou d’individus, c’est son extension. Réunion de deux termes, sujet et attribut, au moyen du verbe « être », la proposition est l’énoncé d’un jugement. Elle est universelle ou particulière d’après l’extension du sujet ; affirmative ou négative selon qu’elle pose ou exclut un terme par rapport à l’autre ; analytique ou synthétique selon que l’attribut fait ou ne fait pas partie de la compréhension du sujet. Le raisonnement peut être immédiat, c’est-à-dire résulter de la seule confrontation des prémisses et des conclusions ; ainsi dans la « conversion » et « l’opposition ». Il est médiat quand il suppose un ou plusieurs intermédiaires entre la proposition d’où l’on part et la proposition où l’on

arrive. De tous les raisonnements médiats le syllogisme est le plus fameux, celui que les scolastiques ont particulièrement étudié. C’est, dit Aristote, « un discours dans lequel, certaines choses étant posées, une autre chose en résulte nécessairement, par cela seul que celles-ci sont posées ». Les trois propositions, dont il est formé, impliquent seulement trois termes ; celui qui sert d’intermédiaire disparaît dans la conclusion.

Tout homme est mortel ;
Or Socrate est homme ;
Donc Socrate est mortel.

Le syllogisme n’est légitime que s’il remplit certaines conditions longuement débattues au moyen-âge et résumées, par les scolastiques, dans huit règles : les deux premières définissent le syllogisme, les six autres interdisent de dépasser dans la conclusion ce qui a été posé dans les prémisses, aussi bien en ce qui concerne les termes qu’en ce qui concerne les propositions. Ce sont des applications du principe d’identité qui permettent de passer du même au même et du plus au moins, jamais du moins au plus. La transgression de ces règles rend le syllogisme captieux : la rigueur de la déduction n’est plus qu’apparente et la conclusion devient vicieuse. En voici deux exemples :

« J’ai ce que je n’ai pas perdu ;
Or je n’ai pas perdu de cornes ;
Donc j’ai des cornes. » Et
« Les nègres sont hommes ;
Or les nègres sont noirs ;
Donc les hommes sont noirs. »

Dans le premier cas on joue avec l’amphibologique expression « je n’ai pas perdu » ; dans le second on donne au terme « hommes » une extension plus large dans la conclusion que dans les prémisses. Les syllogismes diffèrent entre eux soit par le « mode », qui dépend de la nature des propositions, soit par la « figure » qui dépend de la place du moyen terme. Il existe encore des syllogismes hypothétiques, dont la majeure renferme une condition, des syllogismes disjonctifs, dont la majeure énonce une alternative :

Le temps est beau ou mauvais ;
Or il est beau ;
Donc il n’est pas mauvais.

Mentionnons, parmi les variétés de raisonnements médiats, l’enthymème, l’épichérème, le sorite, le polysyllogisme :

Cette rivière fait du bruit ;
Ce qui fait du bruit remue ;
Cette rivière remue.
Ce qui remue n’est pas gelé ;
Cette rivière remue ;
Cette rivière n’est pas gelée, etc.

A côté de l’ancienne logique formelle, celle des propositions d’attribution, les logisticiens modernes veulent créer une logique nouvelle, sorte d’algèbre qui englobe les propositions de relation. Comme l’algèbre, elle use de symboles, qui diffèrent malheureusement avec les auteurs ; les règles logiques se démontrent par théorèmes et corollaires. Et de même que l’on construit des machines à calculer, de même l’anglais Jevons a fabriqué une machine à raisonner. Son piano logique exécute mécaniquement les opérations logiques essentielles, grâce à un système de touches représentant soit les divers rapports possibles, soit un concept ou sa négation. Pourtant beaucoup ne voient dans la logistique qu’une sténographie fort subtile. Elle réduit en formules mathématiques des combinaisons d’idées, négligées par le Stagirique, mais il est douteux qu’elle puisse devenir