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que l’homme devrait vivre (car bien qu’il lui appartienne en bonne partie de conduire sa vie beaucoup plus loin, il ne saurait pourtant résister indéfiniment aux causes accumulées de décadence), mais beaucoup plus que cent ans. L’hygiène générale devrait et pourrait enseigner à bien vivre et à mourir noblement. C’est un art en même temps qu’une science.

Chacun est l’artisan de sa vie comme il l’est de son bonheur, de sorte que le dernier mot du problème de la longévité s’appelle l’Hygiène, qu’il faut entendre du point de vue moral comme du point de vue physique.

Toutes les fautes d’hygiène sont une prime à la maladie et par suite à la mort. Mais il est curieux de constater qu’il semblerait y avoir une contradiction dans les faits envisagés de ce point de vue : l’Hygiène est une science moderne, elle est loin à coup sûr d’avoir dit son dernier mot. Elle est née de façon sérieuse depuis un siècle, depuis Claude Bernard avec ses vues hautes sur la biologie générale et depuis Pasteur avec les lumières qu’il a projetées sur l’origine des maladies parasitaires. Le xixe siècle aura vu la première œuvre de l’hygiène individuelle sérieuse, mais aussi et surtout celle de l’Hygiène dite sociale.

L’idée de faire supporter au milieu ambiant l’énorme part de responsabilité qui lui revient dans la genèse et l’entretien des maux humains devait jeter un jour frappant sur l’avenir et faire germer de grands espoirs dans l’esprit des hommes pour qui vivre vieux est un postulat intéressant.

Or, peut-on dire que ce grand mouvement des idées se soit traduit par des résultats palpables ? Il y a comme une malice dans les événements qui se chargent cyniquement de détruire les plus belles chimères. Jamais l’Homme considéré dans sa masse n’a pratiqué, semble-t-il, plus qu’aujourd’hui, les moyens de se détruire. L’homme succombe moins qu’avant à la tuberculose, mais l’aviation, l’automobilisme, multiplient les causes de décès. Aujourd’hui la mortalité par accident occupe une rubrique de première grandeur parmi les autres causes de mort. Ce n’est pas d’aujourd’hui qu’on a signalé l’illusion du progrès et la relativité encore de ce processus. Ce qu’on dénomme ainsi un peu abusivement n’est parfois qu’une cause intense de régression, de sorte que l’on se demande parfois s’il y a quelque avantage à se porter en avant si l’on ne veut pas ajouter aux causes banales de découragement celles que l’on doit à son propre effort.

Comme tout se tient dans l’histoire de l’Humanité ! Et ce que j’ai dit du mal physique est vrai aussi du mal moral. L’Hygiène dite morale qui balbutie ses premières règles, qui réalise pour l’individu une facile découverte capable d’enrichir sa pensée, d’élever son idéal n’a-t-elle pas aussi pour effet de multiplier ses besoins, de lui imposer par ricochet de nouvelles épreuves s’il se heurte à un milieu mal disposé à favoriser l’évolution de l’Individu.

L’Hygiène mentale, branche de l’Hygiène morale est aussi à ses débuts. Ouvrant des jours nouveaux sur les causes d’amoindrissement cérébral, offrira-t-elle à l’Individu des moyens sérieux de défendre sa vie et par suite d’accroître sa longévité ?

Autant de problèmes qui s’accrochent les uns aux autres et qui montrent tout un monde d’idées se cachant derrière ce petit mot de longévité.

La longévité est-elle du reste une question bien posée sur le terrain de l’Individu ? Est-il intéressant du point de vue de l’Unité de vivre vieux ? J’entends surtout que la question n’est intéressante que par la diminution de la douleur qu’elle fait entrevoir à quiconque a des lueurs en matière d’Hygiène. C’est beaucoup, à coup sûr, mais ne convient-il pas d’élever le problème à des hauteurs où il devient plus large, plus séduisant,

plus poétique, sans cesser d’être réaliste et pragmatique ?

N’oublions pas que la vie et la mort sont deux phénomènes étroitement liés. L’homme qui ne voit que sa propre mort, et par suite sa propre vie n’a que des vues étroites.

Je partage la pensée du philosophe pour qui la vie n’est autre chose que l’art de bien mourir, parce que bien mourir c’est préparer la vie heureuse de nos survivants, c’est-à-dire de nous-mêmes réapparaissant dans la race.

L’individualiste à outrance n’a que des vues bornées s’il n’attend de son effort que des jouissances limitées à sa personne et s’il ne conçoit pas que les disciplines qu’il sait s’imposer, si elles limitent sa liberté, peuvent accroître celle des camarades qui naîtront plus tard, et à qui seront attachées de terribles fatalités.

Diminuer leurs chances de souffrir n’est-ce pas augmenter notre propre élan vital ? Tout s’harmonise, considéré sous cet angle.

On le voit donc :

A l’abri du bourreau social, l’individu peut encore faire œuvre de conservation utile et intéressante, à condition qu’il connaisse les bonnes règles de la vie. Concourir au suicide collectif par négligence ou désintérêt est une absurdité, car l’abandon de soi-même n’est productif que de misères et de souffrances, sans compter qu’il n’est point digne de l’Homme doué d’un cerveau pensant et d’un bras qui travaille. — Dr Legrain.


LOTISSEMENT n. m. Dans la société générale, le lotissement, qui est l’action de lotir, revêt une importance sociale de premier plan et constitue une opération d’économie politique.

Ainsi, dans une liquidation ou succession, attribuer à certains, en accord avec lui, un objet, un meuble, une terre, une maison, etc., c’est faire du lotissement. Et les lots, suivant l’espèce d’organisation sociale sous laquelle on vit, sont déterminés : soit par les moyens dont disposent les classes possédantes, soit par les moyens de tous qui sont d’une égalité relative.

A notre époque de domination du capital et du développement des intelligences en rapport de la fortune, il est impossible à la généralité des travailleurs de pouvoir déterminer le lot auquel ils ont droit par le travail et le mérite.

La naissance assigne, en général, la part de facilités ou d’obstacles que chacun doit rencontrer dans la vie. C’est sous un régime de privilèges et de monopoles que se font les lotissements.

En résumé, dans notre société bourgeoise et d’exploitation des masses, le lotissement dessert toujours le travail à l’avantage du capital. — E. S.


LOUP n. m. (du latin : lupus), fém. louve. Espèce animale du genre chien, qui peuplait il n’y a pas encore bien longtemps, les grandes forêts de l’Europe, mais qui en a à peu près disparu aujourd’hui. On en rencontre beaucoup en Russie, en Sibérie, et dans le nord de l’Asie, ainsi qu’en Amérique septentrionale.

Le pelage du loup est d’un fauve grisâtre, mais varie selon les climats, en roux ou blanchâtre. Plus grand, plus robuste que le chien, cet animal n’en diffère pas cependant très sensiblement et d’ailleurs des accouplements peuvent avoir lieu et les hybrides obtenus restent indéfiniment féconds, ce qui prouve un voisinage de race assez intime. En deux ouvrages absolument remarquables de vie et d’observation : L’appel de la forêt et Croc Blanc, l’écrivain américain Jack London, présente : là un chien de trait, retournant auprès des loups, ses ancêtres, à l’appel de la forêt ; et ici le fils du chien, rede-