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MEC
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mariage et la procréation des enfants ne pouvant s’accommoder d’une vie parfaite. C’est surtout parce qu’il ne poussait point à la multiplication de l’espèce humaine que le manichéisme fut, de bonne heure, suspect aux pouvoirs publics.

Saint Bernard, n’ayant pu convertir les Albigeois français, dont la doctrine s’inspirait de celle des Pauliciens bulgares, l’Église leur déclara une guerre implacable. Une croisade fut prêchée contre eux et, durant vingt ans on tua sans pitié dans la région du Midi occupée par ces hommes inoffensifs. À Béziers soixante mille personnes périrent, catholiques ou albigeois : « Tuez-les tous, avait dit le légat du pape, Dieu reconnaîtra les siens ». Et Simon de Montfort n’entendit faire grâce à personne, pas même à ceux qui abjuraient : « S’il est sincèrement converti, disait-il de l’un de ces derniers, il expiera ses péchés dans la flamme qui purifie tout ». D’innombrables malheureux montèrent sur les bûchers ou pourrirent dans les geôles de l’Inquisition. Ainsi disparut le manichéisme qui avait recruté de nombreux partisans sur le sol français. ‒ L. Barbedette.

Ouvrages à consulter. ‒ Darmesteter, Ormazd et Ahriman, Le Zendavesta. ‒ Henry, Le Parsisme. ‒ Bréal, Le Zendavesta. ‒ Söderblom, La vie future d’après le mazdéisme. ‒ Jackson, Zoroaster. ‒ De Stoop, La diffusion du manichéisme dans l’Empire romain. ‒ Luchaire, Innocent III et la croisade des Albigeois, etc.


MÉCANICIEN n. m. Celui qui s’occupe de construction mécanique, qui dirige une machine ou la conduit.

Dans la construction mécanique moderne, le mécanicien est dédoublé à l’infini. C’est ainsi que l’on doit distinguer entre un ajusteur, un tourneur, un traceur, un monteur, un modeleur. L’emploi de chacun est différent, mais ils travaillent tous dans la mécanique.

Cependant, dans la pratique, n’est qualifié de mécanicien que l’ouvrier dont les connaissances s’étendent à l’assemblage des pièces usinées, à leurs relations, à leur fonctionnement, à la mise en état de marche de la machine construite ; en un mot seul est mécanicien celui qui connaît la mécanique dans son application générale.

L’ouvrière qui, dans la confection de l’habillement, de la chaussure, coud à la machine est, aussi, appelée mécanicienne. Par définition, le mécanicien est le complément de la machine, ce qui lui manque, c’est-à-dire : sa vue et son cerveau.

La puissante locomotive qui remorque à vive allure des tonnes de marchandises ou des centaines de voyageurs, est appelée machine. L’homme, qui voit et pense pour elle est appelé mécanicien.

Dans la voie où la vie moderne s’est engagée, l’habile mécanicien jouera un rôle de premier ordre. ‒ Ripoll.


MÉCANISME n m. (bas latin mechanisma, de mékhané). Ensemble des pièces qui composent une machine. Au fig. combinaison d’éléments : mécanisme du langage, du raisonnement, etc. Ensemble de procédés manuels mécaniques dont l’artiste ne peut se désintéresser, etc.

Philosophie. ‒ Système qui explique tous les phénomènes par des actions mécaniques, les ramène aux propriétés mécaniques de la matière. « Le mécanisme, comme cause immédiate de tous les phénomènes de la nature, était devenu, disait Maine de Biran, le signe distinctif des Cartésiens. » Pour Descartes, en effet, rien, à l’exception de la pensée, n’échappe au mécanisme. Plus uniciste, le matérialisme moderne, au moins

en certaines de ses tendances, incorpore au « mécanisme » (un mécanisme à la fois souple, évolutif et vivant) la pensée elle-même. (Voir Matérialisme).


MÉCANIQUE n. f. (grec : Mêkhané, machine). Se dit de la partie des mathématiques qui a pour but l’étude des lois du mouvement et de l’équilibre, ainsi que de leur application.

Pratiquement, la mécanique est l’art d’imiter, de reproduire artificiellement tous les mouvements de l’espèce animale et d’en accélérer le rythme.

C’est ainsi que, dans le déplacement, la locomotive, l’automobile, l’avion sont intervenus utilement.

Dans l’exercice musculaire qu’exige la production pour la satisfaction des menus besoins de la vie quotidienne, la mécanique est venue augmenter le rendement d’une façon considérable. Cette science est l’une des plus belles découvertes de l’homme, si l’on se rapporte à tout ce qu’elle a d’humain dans son application pratique. Une griffe accouplée à un levier, lui-même déplacé par une bielle, n’est-ce point l’articulation combinée du bras, de l’avant-bras et de la main ? Et combien plus rapide.

La mécanique a tout de l’homme, excepté cependant la vue et le cerveau.

Aussi dit-on d’un travail où l’intelligence n’a que peu de part, qu’il est mécanique.

Tel homme qui répète une fable ou tout autre chose sans ardeur ni flamme, sans comprendre ce qu’il fait ou dit, qui se meut, s’agite à une cadence régulière et toujours irréfléchie, agit mécaniquement, sans penser.

Présentement, hélas ! la mécanique, par ses applications désordonnées, est un facteur de désordre et de misère ; le chômage si préjudiciable aux producteurs est un enfant né de l’application mécanique. (Voir machine, machinisme.)

Cependant, dans une société humaine comme la rêvent les anarchistes, la mécanique sera une grande amie de l’homme, la préservatrice de ses muscles et de son temps, en lui fournissant abondamment tout ce dont il aura besoin, chassant et le souci et la fatigue.

Puisse ce temps ne pas être trop éloigné !

‒ On appelle également mécanique un dispositif placé à côté d’un conducteur de voiture hippomobile et qui sert à freiner les roues de celle-ci. ‒ J. Ripoll.


MÉCÈNE n. m. Mécène fut un favori d’Auguste qui encouragea les artistes et les poètes, en particulier Virgile, Horace et Properce. Son nom est devenu, par la suite, synonyme de protecteur des lettrés, des savants et des artistes ; il s’applique couramment aujourd’hui en guise d’adjectif ou de nom commun. De même le préfet « Poubelle » fut immortalisé grâce aux boîtes à ordures dont il fut l’inventeur et Barrême grâce au livre des Comptes Faits qu’il publia au xviie siècle. Les rois et les papes se donnèrent souvent des allures de mécènes ; ainsi Léon X, françois Ier, Louis XIV. C’était une adroite façon de domestiquer les intellectuels, et de faire servir à leur glorification personnelle les talents des peintres, sculpteurs, architectes et écrivains. Corneille ayant paru trop indépendant à Richelieu fut congédié par lui, comme n’ayant pas l’esprit de suite. Louis XIV s’opposa longtemps à l’élection de La Fontaine à l’Académie, parce qu’il était l’auteur de Contes jugés immoraux par ce souverain, dont les bonnes fortunes furent innombrables. Plier l’échine, se montrer docile, célébrer le maître, telles étaient les conditions primordiales pour rester bien en cour et se voir servir une maigre pension. Naturellement toute velléité révolutionnaire, toute critique du régime établi devaient être rigoureusement bannies. On arrivait ainsi aux platitudes d’un Bossuet, que-l’on a loué surtout parce qu’il représente l’ordre, la tradition, le catholicisme