Aller au contenu

Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 3.djvu/170

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
MER
1514

révoltés on a appelé, au secours des gendarmeries débordées, les soldats détournés de leur rôle officiel. Mais, d’abord docile et prompt à servir la répression, le peuple sous l’uniforme a fini par prendre conscience de la solidarité qui l’unit au travailleur luttant pour le pain quotidien. Il s’est, çà et là, refusé au rôle de briseur de grève. En dépit des mensonges qui troublent ses affinités de classe et d’une discipline qui châtie durement ses élans, l’armée du service obligatoire a cessé d’être la sauvegarde assurée de l’ordre privilégié. On se méfie de ses répugnances croissantes, on craint ses fraternisations susceptibles de s’amplifier en complicités révolutionnaires…

Et la bourgeoisie régnante revient, par l’extension de sa police, par la création de gardes mobiles – corps salariés – par d’alléchantes primes d’engagement et de rengagement qui entraînent la formation d’importants noyaux de militaires payés au sein même des troupes régulières, la bourgeoisie revient, pour sa suprême défense, aux groupes mercenaires. Ultime carte d’une classe favorisée qui range ses derniers esclaves autour du butin amoncelé. La mesure ne la sauvera pas des crises et de la, défaite finale. Comme l’empire romain décadent, confiant sa garde aux guerriers sans âme du mercenariat, le capitalisme verra fléchir, à l’heure critique, le dévouement payé des défenseurs qui ne retiennent à ses côtés que des intérêts momentanés et d’ailleurs équivoques. Les mercenaires retarderont peut-être sa chute. Ils marqueront de quelques pauses sanglantes la marche douloureuse du prolétariat. Mais ils ne sauveront pas le régime que minent de foncières incompatibilités et dont la forme agglomère, facticement, l’organisme. – Lanarque.

Par analogie, mercenaire se dit de ce qui a pour essence, pour mobile ou pour but un intérêt sordide, servi par une basse flagornerie ; il désigne des manœuvres intéressées, parfois soudoyées : âme mercenaire, louanges mercenaires.

Hist. ecclés. : Se disait de prêtres qui n’étaient attachés à aucune paroisse.

Au fig. Homme intéressé, facile à corrompre pour de l’argent : « les ambitieux qu’on loue tant sont des glorieux qui font des bassesses, ou des mercenaires qui veulent être payés » (Fléchier),

Histoire : Guerre des mercenaires : guerre terrible que Carthage eut à soutenir en Afrique contre ses troupes mercenaires, qui s’étaient révoltées parce qu’elles n’étaient pas payées. Elle eut lieu pendant l’intervalle de la première à la deuxième guerre punique (241-238). Mathos et Spendius furent les principaux chefs des rebelles ; Amilcar, chargé de les combattre, réussit à enfermer dans un défilé un corps d’insurgés, et les fit tous massacrer à mesure qu’ils en sortaient ; de 40.000 hommes, pas un n’échappa. On nomma cette guerre la Guerre inexpiable, à cause des fureurs auxquelles elle donna lieu. G. Flaubert s’en est inspiré pour écrire Salammbô.


MÉRIDIEN n. m. (du latin meridianus ; de méridies, midi). On appelle méridien tout cercle passant par les pôles et croisant perpendiculairement l’équateur. Un méridien divise donc le globe terrestre en deux parties égales, dans un sens opposé à l’équateur.

D’après la théorie tirée par Newton de la loi de l’attraction universelle rattachée à la rotation de notre planète autour de son axe passant par le pôle nord et le pôle sud, la terre doit représenter un ellipsoïde de révolution aplati aux pôles et renflé à l’équateur. Pour plus de simplicité représentons-nous la terre comme une sphère parfaite ; le diamètre de cette sphère étant suffisamment prolongé percera le globe en deux points appelés les pôles de la terre ; celui tourné vers

l’étoile polaire (alpha de la petite Ourse) s’appellera le pôle nord, l’autre sera le pôle sud. La ligne qui joint les deux pôles l’un à l’autre (diamètre de notre sphère) constitue l’axe de la terre ou ligne des pôles.

Considérant l’axe terrestre, par le centre de notre planète, menons un plan qui lui soit perpendiculaire. Ce plan divisera la sphère en deux parties égales dont chacune renfermera un pôle. Ce grand cercle qui divisera le globe en deux hémisphères est l’équateur. Un plan quelconque passant par les axes terrestres, donc par les pôles du globe, et croisant perpendiculairement l’équateur constituera un méridien. Il s’en suit qu’il y a autant de méridiens que l’on peut concevoir de points sur l’équateur par lesquels on puisse faire passer une ligne passant par les deux pôles ou, en d’autres termes, tout cercle passant par les deux pôles est un méridien. Tout objet sur la terre a son méridien, il suffit de faire passer par un des pôles la ligne partie de lui et de la ramener à cet objet en passant par l’autre pôle ; le méridien change évidemment quand l’objet n’est pas immobile : le méridien de l’homme se déplace avec lui.

L’équateur de notre globe a été divisé en 360 parties ou mieux en deux fois 180 degrés ; par chacun de ces points de divisions on a fait passer un méridien en comptant 180 méridiens à l’est et 180 à l’ouest, à partir d’un méridien initial choisi comme méridien d’origine. En numérotant les méridiens dans chaque sens, est et ouest, de 0 à 180, à partir du méridien d’origine, on obtient une première détermination d’un point à la surface de la terre. Mais comme il ne suffit pas de savoir qu’un point se trouve sur un méridien déterminé pour connaître sa position exacte il a fallu imaginer une seconde ligne sur laquelle il se trouve également. Cette deuxième ligne c’est un parallèle. Un parallèle correspond à une ligne imaginaire parallèle à l’équateur et perpendiculaire à la ligne des pôles. Les méridiens ont été divisés à partir de l’équateur et de part et d’autre de celui-ci en 90 parties égales et par chacun de ces points de divisions on a fait passer un parallèle. La position d’un point à la surface de la terre est donc déterminé exactement quand on sait sur quel parallèle et sur quel méridien il se trouve. Sa position sera donc à l’intersection du parallèle et du méridien ; nous avons ainsi les coordonnées géographiques d’un point. (Voir latitude et longitude.) Jadis chaque nation choisissait comme méridien d’origine celui qui passait par l’observatoire de sa capitale. Cette façon de faire était une source de confusions regrettables pour la comparaison des longitudes. Une entente internationale entre les différents États a, depuis, mis fin à ce désordre et une réforme heureuse a décidé que désormais on compterait les longitudes à partir du méridien de Greenwich (Angleterre), choisi comme méridien d’origine. À cette unification nécessaire a correspondu l’unification de l’heure sur toute l’étendue du globe.

La mesure exacte de la terre et la détermination de sa forme ont, avons-nous dit, conduit les savants à admettre que la terre a la forme d’un ellipsoïde de révolution aplati aux pôles et renflé à l’équateur. La forme du méridien n’est donc pas un cercle mais celle d’un ellipsoïde dont le petit axe dirigé suivant la ligne des pôles a environ trois centièmes de moins que le grand axe dirigé suivant le diamètre de l’équateur. Si la terre était rigoureusement sphérique, un arc de méridien joignant deux points de la terre par un nombre déterminé de degrés de latitude aurait partout la même longueur. La mesure d’un arc de méridien doit donc nous renseigner non seulement sur la forme exacte de notre globe, mais encore nous donner les dimensions de celui-ci.

Ces mesures furent entreprises de tout temps.