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indispensable d’arriver à une convention uniforme, afin que les chiffres donnés par différents expérimentateurs soient comparables, sinon la confusion serait extrême. Cela est cependant difficile pour deux raisons. En premier lieu, il ne convient pas d’employer la même unité pour des grandeurs très différentes de la même propriété, sans quoi les mesures seraient exprimées par des nombres ayant trop de chiffres figuratifs. Pour éviter ce premier inconvénient, on peut prendre des unités différant dans le rapport de 1 à 1000 ; de cette façon les confusions ne sont guère possibles. On emploie ainsi pour les longueurs le kilomètre, le mètre et le micron ; pour la quantité de chaleur la grande et la petite calorie.

Une seconde difficulté résulte de traditions anciennes difficiles à déraciner.

Jusqu’à la Révolution on employa, en France, des mesures qui présentaient deux inconvénients principaux : 1° une confusion extrême : un même mot pouvait désigner plusieurs unités de valeurs différentes ; 2° les subdivisions des différentes unités n’étaient pas en rapport avec notre système de numération qui était et est encore décimal. En 1790, la Constituante adopta un projet d’unification des unités de mesure. De 1792 à 1799 un arc du méridien de Paris, entre Dunkerque et Barcelone fut mesuré, on en déduisit la longueur totale du méridien et la quarante millionième partie de cette longueur fut prise pour unité de longueur et reçut le nom de mètre. Le mètre servit de base à toutes les autres unités du nouveau système dit système métrique et ce système dit aussi système des poids et mesures – à tort car les poids sont des mesures, comme les longueurs, les surfaces, etc. – employa le système décimal pour les multiples et les sous multiples.

Ce n’était pas là le terme du progrès. En 1881 un congrès d’électriciens adopta le système C. G. S. ayant pour bases le centimètre, le gramme et la seconde. Un troisième système connu sous le nom de système M. K. S. prend comme unités de mesures le mètre, le kilogramme et la seconde.

Enfin une loi sur les unités de mesure, du 2 avril 1919 (Journal officiel, 4 avril 1919) impose un nouveau système, dit système M. T. S., parce qu’il a comme unités fondamentales le mètre, pour les longueurs ; la tonne, pour les masses et la seconde, pour le temps. Cette loi était justifiée par les progrès scientifiques et industriels ; l’énergie électrique, par exemple, est aujourd’hui de vente courante et exige l’emploi d’unités spéciales qu’il était utile de fixer comme l’étaient les unités de longueur, de surface, de volume, etc. De cette loi qui n’apportait nul changement à notre système monétaire, nous extrayons le tableau des unités principales :

Longueur. L’unité principale de longueur est le mètre. L’étalon pour les mesures de longueur est le mètre, longueur définie à la température de 0 degré par le prototype international en platine iridié qui a été sanctionné par la conférence générale des poids et mesures, tenue à Paris en 1889, et qui est déposé au pavillon de Breteuil, à Sèvres.

L’unité de longueur, de laquelle seront déduites les unités de la mécanique industrielle, est le mètre.

Masse. L’unité principale de masse est le kilogramme. L’étalon pour les mesures de masse est le kilogramme.

L’unité de masse, de laquelle seront déduites les unités de la mécanique industrielle est la tonne, qui vaut 1000 kilos.

Temps. L’unité principale de temps est la seconde. La seconde est la fraction 1/86400 du jour solaire moyen.

L’unité de temps, de laquelle seront déduites les unités de la mécanique industrielle est la seconde.

Électricité. Les unités principales électriques sont l’ohm, unité de résistance, et l’ampère, unité d’intensité de courant, conformément aux résolutions de la conférence des unités électriques, tenue à Londres en 1908.

L’étalon pour les mesures de résistance est l’ohm international qui est la résistance offerte à un courant électrique invariable, par une colonne de mercure à la température de la glace fondante, d’une masse de 14, 4521 grammes, d’une section constante et d’une longueur de 106.300 centimètres.

L’ampère international est le courant électrique invariable qui, en passant à travers une solution de nitrate d’argent dans l’eau, dépose de l’argent en proportion de 0,00111800 grammes par seconde.

Température. Les températures sont exprimées en degrés centésimaux.

Le degré centésimal est la variation de température qui produit la centième partie de l’accroissement de pression que subit une masse d’un gaz parfait quand, le volume étant constant, la température passe du point 0° (température de la glace fondante) au point 100° (température d’ébullition de l’eau), tels que ces deux points ont été définis par la conférence générale des poids et mesures de 1889 et par celle de 1913.

Intensité lumineuse. L’unité principale d’intensité lumineuse est la bougie décimale dont la valeur est le vingtième de l’étalon Violle.

L’étalon pour les mesures d’intensité lumineuse est l’étalon Violle, source lumineuse constituée par une aire égale à celle d’un carré d’un centimètre de côté prise à la surface d’un bain de platine rayonnant normalement à la température de solidification, conformément aux décisions de la conférence internationale des électriciens, tenue à Paris en 1884 et du congrès international des électriciens, tenu à Paris en 1889. »

Nous avons cité intégralement ce tableau pour en tirer quelques remarques. D’abord la loi a suivi, avec assez de retard même, des progrès dans la mesure résultant de progrès industriels et commerciaux comme aussi des accords scientifiques internationaux réalisés par des savants. La loi sur les unités de mesure a sanctionné des mesures adoptées, tout comme la loi sur les syndicats ouvriers a sanctionné des libertés conquises par la classe ouvrière.

Une deuxième remarque s’impose. Alors qu’on s’est efforce et qu’on s’efforce encore de montrer aux écoliers la logique du système métrique en faisant dériver les unités des mesures de surfaces, de volumes, de capacités, de poids, et des monnaies, d’une seule unité principale, le mètre, dont la longueur serait elle-même déterminée avec précision par notre globe, le tableau précédent ne laisse pas apparaître un tel enchaînement. C’est que cet enchaînement était en grande partie artificiel et que ses données étaient légèrement inexactes : un décimètre cube d’eau, aux conditions indiquées ordinairement ne pèse pas tout à fait un kilogramme ; la différence est inférieure à un trentième de gramme mais n’en existe pas moins. Ainsi les unités des mesures de poids, de masse, etc., sont indépendantes de l’unité des mesures de longueur. Ce n’est pas tout. En mesurant le méridien on a commis des erreurs, de nouvelles mesures seraient sans doute plus précises ; mais cependant on ne pourrait pas affirmer trouver la mesure de ce méridien à un dix millionième près ; or, on peut construire actuellement des mètres qui ne différeront du mètre déposé au pavillon de Breteuil que d’une quantité inférieure à un dix-millionième de la longueur de ce dernier et cette construction peut être faite en bien moins de temps qu’il n’en faudrait pour recommencer la mesure d’une fraction suffisante du méridien de Paris. La définition du mètre par une barre type est donc plus précise. L’unité de mesure initiale ne peut qu’être arbitraire et