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Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 3.djvu/277

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Il nous est pour ainsi dire impossible de connaître le poids absolu et la grandeur des molécules. On ne peut saisir entre elles que des rapports de poids et de volume. Ces rapports constituant la connaissance des poids et des volumes moléculaires sont rapportés à une unité constante : le poids d’un atome d’hydrogène. Les molécules des différents corps pèseront donc plus ou moins que l’atome d’hydrogène, lequel pèse notablement moins « que le milliardième de milliardième de milligramme ». (J,. Perrin : les Atomes.)

Il nous est difficile de nous faire une idée de la petitesse des atomes constitutifs des molécules — deux atomes au moins devant être réunis pour constituer une molécule. — Dans une tête d’épingle ordinaire, il y aurait 8 sextillions d’atomes (8000 milliards de milliards). Un millimètre cube d’hydrogène contiendrait 36 millions de milliards de molécules. Et un millimètre cube d’éther renferme d’après Clausius et Maxwell, 7716 x (10 élevé à la 54e puissance) d’atomes ou 7716 suivi de 53 zéros !

La vitesse avec laquelle se meuvent les molécules a été évaluée a 1698 mètres par seconde pour l’hydrogène, tandis que pour les gaz plus lourds, elle varie avec le poids tout en diminuant d’une façon notable.

La chimie moderne ne saurait se passer actuellement de la théorie atomique ; sans elle toutes les conceptions qu’elle renferme s’écrouleraient. Ce n’est cependant qu’une hypothèse ; nous n’avons aucune idée réelle de ce qu’est un atome. Nous ne savons rien de sa constitution, de sa forme, de son poids réel, de sa position, de sa couleur. Mais, venue de l’Antiquité jusqu’à nos jours, toujours perfectionnée, et vivante, confirmée et renouvelée par les travaux modernes sur la radioactivité, elle a l’avantage énorme d’être un instrument fécond dont les fruits et les applications sont nombreuses et bienfaisantes et c’est grâce à elle que le problème de la matière a cessé d’être un problème métaphysique, pour devenir de plus en plus un problème d’ordre expérimental et positif. — Ch. Alexandre.


MONARCHIE n. f. (latin, monarchia : de monos, seul, et arkhein, commander). La monarchie, cette vieille souillure de notre planète, date de l’anthropophagie. Elle a pour emblème un oiseau de proie et constitue un recul monstrueux, une honte et une dégradation ignominieuse de l’espèce humaine sur sa propre préhistoire.

De nombreuses recherches historiques attestent que l’homme primitif vivait relativement heureux dans la promiscuité sexuelle et la communauté de la cueillette et de la pêche au bord des grands fleuves de la forêt vierge.

Mais les intempéries et les attaques des bêtes sauvages, l’insécurité et la pénurie créèrent, stimulées par l’ignorance et la peur : Dieu, le règne de la ruse, de la force et la notion antisociale du tien et du mien qui enfantèrent, avec le prêtre, le guerrier et le trafiquant, l’inique société humaine, basée sur la Religion, la Propriété et la Famille.

La Religion, cela veut dire la croyance en un Dieu de justice, de bonté et de toute-puissance qui, en créant l’homme à « son image », le tire du néant et le condamne férocement à mort en lui donnant la vie. La Religion, c’est encore le dualisme du Corps et de l’Esprit au lieu du monisme de la nature.

La Propriété, cela signifie la division de l’humanité en classes rivales et ennemies, en riches et en pauvres, en exploiteurs et en exploités, en gouvernants et en esclaves travaillant depuis des millénaires, sans répit ni espoir, « à la sueur de leur front » pour engraisser une minorité infime de parasites malfaisants.

La Famille, hypocrisie suprême ; c’est la paternité physiologiquement incertaine dont la loi fait le pivot du groupe affectif au lieu de la maternité qui ne sau-

rait être douteuse. C’est l’enfant à tout âge qui doit, d’après le § 371 du Code, respect à ses parents et de la femme, que les § § 212 et 213 du même Code condamnent à obéir à son mari, seigneur et maître, qu’elle doit suivre où bon lui semble. La famille, embryon de monarchie, c’est l’inégalité des sexes, la discorde à domicile et la flétrissure de l’amour libre, qui est seul conforme à la sélection naturelle.

La monarchie est la forme politique la plus cyniquement arbitraire qui ait jamais reflété le tréfonds d’antagonismes et d’iniquités des sociétés humaines. Rien que son caractère héréditaire constitue la consécration de l’esclavage du régime. (V. État, société, etc.).

Mais la monarchie, en dépit de son nom, n’a jamais été, au sens absolu du mot, le gouvernement d’un seul. Partout et toujours le roi absolu partageait le pouvoir avec une hiérarchie restreinte, héréditaire, et aristocratique, gouvernant et exploitant la foule des travailleurs, parias et esclaves, au profit de ses privilèges.

Le gouvernement d’un seul, dans le sens exact du mot, n’a jamais été qu’un pieux désir des faibles et des impotents à la recherche d’un homme, incarnation suprême de leur Dieu, qui se chargerait de gouverner la société en comblant de ses bienfaits les bons et en châtiant les méchants.

Même les Républiques historiques qui sont des progrès indéniables — moralement — sur l’abjection monarchiste, comme le Salariat l’est sur l’esclavage antique, ne sont, elles aussi, qu’un moyen de gouverner et d’asservir le peuple producteur, sous le voile hypocrite de la souveraineté nationale, aux élus de la naissance et de la fortune.

L’histoire de l’humanité, a dit Büchner, est un épouvantable cauchemar d’où émergent trois points lumineux : la Grèce antique, la Renaissance et la Grande Révolution Française, c’est-à-dire l’aspiration vers le beau, la prise de possession de la Terre avec la conquête du Ciel, et l’affirmation des Droits de l’Homme, complétée par le Manifeste des Égaux réclamant l’égalité de fait, l’égalité économique.

Le reste de l’histoire humaine appartient, hélas ! aux rois et aux prêtres, à ce cauchemar sinistre dont parle le philosophe matérialiste allemand et qu’éclairent seuls les bûchers des suppliciés. La royauté, l’empire, la monarchie… un long cri d’angoisse répond il cette évocation, à cette horreur des horreurs !

Comme Jéhovah, d’après la Bible, n’a pu trouver un juste à Sodome et Gomorrhe, nous ne voyons pas un monarque, mais pas un seul — Marc Aurèle, l’empereur philosophe y compris —, qui, en bonne justice, n’aurait pas dû être mis à mort en vertu de cette loi d’hygiène et de préservation sociale qui dit que celui qui se met au-dessus de l’humanité doit être extrait du nombre des vivants.

Les antiques monarchies de l’Orient, l’égyptienne, l’assyrienne, la mède et la persane étaient des despoties pures. L’assyrienne et la chaldéenne, avec sa somptueuse capitale Babylone, aux jardins suspendus de Sémiramis et aux cent tours, est caractérisée par la légende qui veut que, pendant une orgie qui eut lieu au palais du roi, des lettres de feu apparurent sur les murs formant les mots mane, thecel, phares, c’est-à-dire pesé, compté, divisé… et Babylone fut détruite et rasée.

Au pays des Pharaons, la vanité des monarques sacrifiait la vie de milliers d’hommes, de fellahs, pour se faire construire des monuments funéraires, vieux comme la pyramide de Chéops de 6000 ans et atteignant 150 mètres de hauteur. Pour excuser les Pharaons on a prétendu que les pyramides avaient été édifiées pour faire des observations astronomiques. Elle y ont été partiellement affectées, mais ce goût des Pharaons constructeurs pour l’astronomie semble tout de même douteux.