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Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 3.djvu/441

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NEC
1785

tive. Il suffit, pour s’en rendre compte, d’essayer de se représenter des dimensions hors de l’échelle humaine, pour comprendre qu’une distance cosmique ou inter-atomique ne correspond à rien de connu dans notre esprit. L’erreur de tous les philosophes qui ont suivi Kant, dans son concept de l’espace, vient de ce fait qu’ils supposent, tout comme lui, que la notion d’espace est antérieure à toute expérience, alors qu’il est manifeste qu’une telle affirmation ne pourrait se fonder que sur la démonstration irréfutable de l’existence de cette notion chez le nouveau-né. Contrairement à cette conception, toutes les observations sur les enfants démontrent, chez eux, l’absence de la notion précise d’espace et de distance, la confusion des plans, la défectuosité de la vision et de l’adaptation des gestes à la préhension des objets diversement éloignés. D’autre part, ce n’est qu’à un âge relativement avancé, après d’innombrables expériences, que l’être humain conçoit l’espace et le temps. Ce qui détruit la thèse Kantienne.

Quant à l’expression populaire : « retourner au néant », cela signifie disparaître, cesser d’être et non continuer d’exister sous une autre forme. Anéantissement est synonyme de destruction, non de continuation. — Ixigrec.


NÉBULEUSE n. f. (du latin : nebula, nuage). On appelle « nébuleuses » des taches d’aspect laiteux, aux contours imprécis, présentant beaucoup d’analogies avec les légers nuages blanchâtres appelles « cirrus », et perdues comme de pâles lueurs dans l’insondable espace. Avant les perfectionnements de l’optique, avant l’application de la spectroscopie à l’étude du monde sidéral, ou supposait que ces créations de la nature étaient toutes composées de vapeurs cosmiques phosphorescentes, de tourbillons de substances lumineuses. Les perfectionnements récents des instruments d’optique et la spectroscopie nous permettent de diviser les nébuleuses en trois catégories distinctes. La première comprend les amas d’étoiles, qui seraient comme des prolongements de notre voie lactée et situés extrêmement loin dans l’espace, à des distances variant de 200.000 à 225.000 années de lumière. Parmi ces amas, presque tous de forme globulaire et généralement composés d’une multitude d’étoiles très voisines en apparence, mais, en réalité, séparées par des distances énormes qui sont de plusieurs années lumière ; il convient de citer les deux nuées de Magellan, dans l’Hémisphère austral, renfermant plusieurs centaines de milliers d’étoiles. Dans les mêmes parages, notons l’amas du Toucan, celui du Centaure et, dans l’Hémisphère boréal, nous remarquons le magnifique amas d’Hercule, renfermant plus de 6.000 étoiles.

Pour les nébuleuses de la seconde catégorie, la spectroscopie est venue préciser la différence d’avec les premières. Ce sont de véritables masses gazeuses, isolées au milieu de l’espace interstellaire et composées d’hydrogène, d’hélium, ainsi que d’un élément encore inconnu sur notre globe auquel on a réservé le nom de « nébulium ». Ces nébuleuses gazeuses qui ont des dimensions énormes et dont le nombre est très élevé sont des corps froids (température probable 223 degrés sous zéro), qui ne sont lumineux que parce que l’arrivée en leur sein de poussières électrisées chassées par la pression de la radiation, les rend luminescentes et permet de les apercevoir, malgré leur basse température, sur le fond obscur du ciel. Constituées par la matière à un état de raréfaction extrême, ces ]nébuleuses qui présentent différentes formes, depuis celle sans contours définis, comme la grande nébuleuse d’Orion, jusqu’à celle qui se révèle comme un anneau de matière nébulaire entourant un noyau central (nébuleuse annulaire de la Lyre), sont le berceau, la semence des mondes futurs.

Le troisième groupe de nébuleuses comprend les nébuleuses spirales, présentant l’aspect d’une vaste spirale ou d’un immense tourbillon. Ces nébuleuses, dont le nombre est voisin du million, semblent s’écarter de la Voie Lactée et se montrent particulièrement nombreuses vers les pôles de la Galaxie. Elles s’éloignent de celle-ci à des vitesses moyennes de 500 à 700 kilomètres à la seconde et constituent des Voies Lactées différentes de la nôtre. Nous devons les considérer comme de véritables univers, d’étendue énorme, extérieurs à notre univers stellaire. La spectroscopie nous les montre comme réellement composée de millions et de millions d’étoiles et de même nature que notre Voie Lactée. (voir ce mot et Univers) et composées, comme elle de milliards d’étoiles, de nébuleuses non résolubles et d’amas stellaires importants. Les plus proches sont à la distance de 100.000 parsecs (un parsec équivaut à 3, 26 années-lumière) et ont des dimensions analogue à la Voie Lactée. La plupart d’entre elles sont situées à plus d’un million de parsecs et la lumière emploie, pour les plus éloignés, 8 à 10 millions d’années-lumière pour nous parvenir. Elles sont séparées entre elles et de notre système galactique par des océans de vide que la lumière si follement rapide ne franchit qu’en des myriades de siècles. Citons, parmi les plus remarquables d’entre les spirales, la belle nébuleuse des Chiens de chasse, la magnifique spirale de la Vierge, celle d’Andromède, de la Grande Ourse, etc… — C. A.


NÉCESSAIRE, NÉCESSITÉ (du latin necessarius). — Voici quelques-unes des meilleures définitions de ce qui est nécessaire, empruntées au dictionnaire philosophique de Lalande :

1o Est dit « nécessaire » l’être qui ne dépend, pour exister, d’aucune autre cause ou condition ;

2o Est dit « nécessaire » (par rapport à un ensemble de causes données), l’effet qui en résulte infailliblement ;

3o Est dit « nécessaire », l’enchaînement des causes et des effets dans un système déterminé ;

4o Est dit « nécessaire » le rapport d’un moyen à une fin, d’un condition à un conditionné, si cette fin ne peut être atteinte que par ce moyen, ou si ce conditionné ne peut être réalisé que sous cette condition.

Remarquons que, sauf la première des définitions, toutes les autres ne prennent leur caractère de nécessité que a posteriori : après expérience. Ce qui les ramènerait en somme à ceci : « Est nécessaire ce qui est, ce qui existe et se passe dans le présent. » Ce caractère de nécessité se rapporterait donc aux faits présents que l’on subit, que rien ne peut modifier et contre lesquels on ne peut rien. Ce qui n’est donné que par les faits tirés de l’expérience. D’après cela, tout événement futur ne serait pas absolument nécessaire, tant qu’il ne s’est pas complètement réalisé, qu’il ne s’est point imposé par l’existence même. D’où vient alors que certains phénomènes futurs prennent pour nous le caractère de la nécessité absolue, par exemple la chute d’une pierre jetée en l’air, ou même notre propre mort ? Cela vient d’une particularité psychologique créée par l’expérience qui fait qu’une série de phénomènes dont la succession et la répétition s’effectuent toujours avec la même invariabilité, sans aucune exception connue, se présente à notre esprit avec le même degré de certitude pour le futur que pour le passé. Le futur « est comme déjà joué » (pour employer l’expression assez heureuse de Bergson). Cela nous ramène à l’éternelle question du déterminisme, à la nécessité en soi et à la première définition, citée plus haut, de ce qui est nécessaire. Il est évident qu’il y a quelque chose qui existe par soi-même, car ce n’est ni nier, ni expliquer l’existence d’une chose en soi, c’est rendre toute existence intelligible.