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Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 3.djvu/93

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MAR
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travail, simplement utiles au bonheur social. Le marxisme fait, plus ou moins ouvertement, cause commune avec l’économie politique courante, ne remarquant pas que l’escobarderie des politiciens enseigne la confusion de l’indispensable avec l’utile en confondant ainsi le propre avec le figuré. Cette confusion générale des richesses, voulue par les économistes et passablement de socialistes, a, pour conséquence sociale de faire payer tous les impôts par les travailleurs, d’établir le salaire ‒ ou prix du travail ‒au minimum des circonstances, et, par suite, de maintenir, le mieux possible, l’esclavage des masses.

Le marxisme, loin d’être le fossoyeur du régime bourgeois, qu’il combat théoriquement par des mythes, le continue pratiquement sur un plan fonctionnariste où, par une solidarité illusoire la liberté individuelle et l’égalité relative au mérite de chacun seraient écrasées par une vague et irresponsable administration des choses aussi despotique que la féodalité financière de notre époque.

Le socialisme rationnel, en tant qu’organisation sociale, peut et doit développer, chez les travailleurs, l’esprit d’examen et par suite, selon les connaissances et les circonstances, l’esprit d’association libre

L’homme, naturellement, ne peut tendre, en toute circonstance, pour une association forcée… comme il ressort du marxisme appliqué… L’homme doit être libre de travailler en association ou isolément.

De ce qui précède, il résulte que le marxisme est la caractéristique d’une époque de dissolution sociale. Ne sachant exactement quelle route suivre, il s’attache mystiquement à l’apparence des faits qui naissent du mécanicisme d’une période de désordre social et économique.

Fasciné par le mirage économique de la théorie du mouvement, le marxisme étudie spécialement les effets d’un système d’iniquités sociales sans remonter aux causes. Dans un but spécialement politique, le marxisme entretient l’équivoque, soit en ne faisant qu’effleurer le sujet dont il paraît s’occuper, soit en passant sous silence les faits dont il redoute l’examen.

Le marxisme, plus ou moins orthodoxe ou l’Au-delà du marxisme, reposent sur des fictions ou des utopies qui situent le socialisme dans le domaine du mysticisme. ‒ Élie Soubeyran.


MASSE. s. f. (du bas latin massa). Les parties conglomérées de matière qui font corps ensemble. Corps compact très solide. Un gros corps, informe, est qualifié de masse. La totalité d’une chose. Le fonds d’argent d’une société ou d’une succession. Une grande quantité d’objets. La caisse spéciale d’un régiment à laquelle tous les soldats contribuent.

En mécanique, le rapport d’une force à l’accélération du mouvement qu’elle produit dans certaines applications. L’ensemble d’un édifice par rapport à ses proportions. Gros marteau ou maillet, espèce de massue. Bâton à tête d’argent ou d’or qu’on portait dans certaines cérémonies. Gros bout de la queue de billard.

Dans la terminologie politique, et économique et sociale, le peuple, en général, constitue la masse. Sous ce rapport il ne faut pas oublier qu’il n’y a des hommes qu’on appelle la masse ou les masses que parce qu’il y a ignorance sociale. Ces masses sont alors matières à exploitation.

Cette exploitation, qui est condition d’ordre relatif pour autant qu’il est possible aux classes dirigeantes de la maintenir, est regardée par celle-ci comme une nécessité puisque l’ordre social dont elles bénéficient est à ce prix.

« L’emploi du mot masses par nos réformateurs dans le sens peuple ou prolétaire, dit de Potter, suffit pour faire comprendre que la réforme qu’ils projettent est

exclusivement matérielle, et qu’eux-mêmes, le sachant ou l’ignorant, sont matérialistes. »

Ce sont ces mêmes hommes qui, faisant fonctionner leur esprit, en appellent au mécanisme de l’intelligence pour établir la physique sociale.

Qu’il y eût des masses pour ceux qui fondaient la société sur la foi, c’est facile à concevoir ; qu’il y ait encore des masses pour les conservateurs sociaux qui veulent substituer la force par la ruse à la croyance, c’est logique. En est-il de même quand on cherche et désire la découverte de la vérité et l’application de la justice ? Cela ne s’explique plus.

Ceux, alors, qui semblent s’apitoyer sur le sort des masses et vouloir améliorer leurs conditions ne font que déplacer la question qui les embarrasse. En invitant ces masses à se débarrasser d’un ordre de choses dont eux-mêmes sont mécontents parce qu’ils n’y ont pas la part dominante qu’ils désirent, ils préparent des lendemains cuisants.

Combien de réformateurs, dans notre République, sont devenus conservateurs quand leur part leur a paru suffisante ? Cela prouve que l’instruction ne suffit pas pour former la probité et l’honnêteté. L’éducation faisant défaut chez ces personnes, leur conscience est conforme à leur appétit.

Ainsi les masses ont vu et voient tous les jours que la plupart de ceux à qui elles ont permis de se gorger de richesses ne changent pas leur condition sociale. Et cependant malgré les douloureuses leçons de l’expérience, ces masses restent amorphes sous l’emprise des préjugés que les mauvais bergers leur ont inculqués, au lieu de leur apprendre les causes de leur misère et de leur esclavage économique, ainsi que les moyens propres à accélérer leur libération générale. — Élie Soubeyran.

MASSE, LES MASSES. Expression généralement employée par les propagandistes sociaux, pour désigner les travailleurs des villes et des campagnes. Cette dénomination n’a, en fait, aucune signification précise, réelle, concrète. Les communistes autoritaires la remplacent souvent par celle de « couches profondes » qui n’a pas un caractère plus net, plus spécifique.

En réalité, les masses ce sont : le prolétariat, la classe ouvrière, la grande masse des spoliés et des déshérités, catégorie singulièrement imposante par le nombre si on la compare à la minorité que favorise le régime, multitude vers laquelle se tourne, dépouillée d’orgueil et d’ambition, la sympathie de ceux qui souffrent de ses maux.

Les anarchistes et les syndicalistes révolutionnaires fédéralistes ont, du caractère et de la valeur des masses, et de l’intérêt à lui porter, une conception toute différente de celle des autoritaires marxistes. Ils hésitent même aujourd’hui à employer ce terme, à voir de quelle façon dédaigneuse l’utilisent trop souvent les États-Majors, et ces propagandistes du Parti communiste qui, eux, il va sans dire, constituent « l’élite », sacrée telle par elle-même.

Pour nous les « masses » méprisées par les politiciens, et auxquelles on lance, périodiquement, des appels tour à tour véhéments et rageurs, insultants et stupides, ne sont pas des êtres amorphes, sans pensée, sans vie propre, sans désirs, sans idéal ; qui n’ont d’autre mission historique que de hisser au pouvoir telle ou telle clique politique qui règnera sur elles ; que de servir de « cobayes » aux chirurgiens et aux « docteurs » de la « révolution » au cours de leurs « expériences sociales ».

C’est du sein des masses, sous leur impulsion, que surgiront les hommes d’action qui renverseront l’ordre bourgeois ; ce sont les masses qui règleront les comptes du capitalisme ; ce sont ces « masses » qui édifieront