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porte quel moment de la journée peut être adopté dès l’instant qu’il sera antérieur aux repas.

Un nombre respectable d’ouvrages traitant de l’éducation physique constituent, par les enseignements qu’ils renferment, une véritable encyclopédie culturiste. Ils guideront le profane vers une initiation profitable et quintessenciée. Nous citerons, au hasard parmi d’autres non moins intéressants, ceux du Professeur Demeny, de Müller, du Commandant Hebert, du Professeur Desbonnet, du Docteur Ruffier, de Sandow, du Docteur Pagès, du Docteur Chauvois, du Docteur Pescher, etc., etc.

Nous accorderons cependant une mention spéciale à « Mon Système », de Müller, dont la formule inspirée de la gymnastique de Ling, résume les enseignements gymniques tout en les émaillant de judicieux principes d’hygiène. « Mon Système » sera le vade-mecum des non initiés.

Comme tout ce qui concerne la culture du moi, la pratique de la culture physique exige du postulant une volonté constante et tendue (mais elle a, en vertu de lois déjà citées, de bienfaisantes répercussions sur cette même volonté). Elle n’offre pas l’attrait des jeux de plein air, l’agrément des sports d’équipes par exemple. Le reproche le plus sérieux qu’on puisse lui faire est de manquer de gaîté. Mais si l’on met en balance le petit inconvénient que cela comporte et les immenses avantages qu’elle procure, le grief s’évanouit. D’ailleurs quiconque s’accorde régulièrement sa séance matinale d’assouplissement finit par en ressentir l’impérieux besoin et trouve, à l’accomplir, une réelle satisfaction. Et puis « Paris vaut bien une messe », disait Henri IV, exprimant par là qu’il serait malséant de reculer devant une chose relativement désagréable si elle est une source de profits.

Il serait souhaitable que l’enseignement pédagogique, qui n’aborde qu’avec une extrême timidité les importantes questions d’hygiène, assimilât à ses programmes l’initiation gymnique. Elle s’inspirerait profitablement des préceptes de la « Méthode Müller » et surtout de la « Méthode Hébert » qui joint l’utile à l’agréable.

Lorsque l’humanité entière sera conquise aux principes culturistes et ralliée aux autres formules d’hygiène, les innombrables fléaux pathogéniques qui l’accablent ne seront plus que souvenirs historiques, errements des époques où fleurissait une civilisation encore enlisée dans la barbarie. — J. Meline.

Ouvrages recommandés. — Mon Système (Müller). — Le Code de la force ; Guide pratique d’éducation physique ; Les sports contre l’éducation physique (G. Hébert). — L’entraînement respiratoire par la méthode spiroscopique (Dr  J. Pescher). — Soyons forts (Dr  Ruffier). — Les dessanglés du ventre ; La machine humaine, anatomie (Dr  Chauvois). — Ma méthode ; Manuel de culture physique (Dr  Pagès). — Gymnastique suédoise (André et Kimlim). — La rééducation. respiratoire et les sports respiratoires (Sandow). — Restez jeunes ; L’éducation physique de l’enfant (Dr  Pauchet). — Pour rendre nos enfants souples et gracieux (Lebigot et Coquerelle), etc., etc.


PLAGIAT n. m. On appelle communément plagiat le fait de « s’approprier la pensée d’autrui » (Larousse). « Quand un auteur vend les pensées d’un autre pour les siennes, ce larcin s’appelle plagiat. » (Voltaire.) Le plagiat est une des supercheries de « l’industrie littéraire », et l’une des plus graves, mais il n’est pas la plus grave. Celui qui s’approprie le bien d’autrui et qu’on appelle un « voleur » est souvent excusable, par exemple lorsqu’il n’a pas d’autre moyen d’assurer sa subsistance. Il est moins excusable lorsqu’il recherche un superflu ou obéit à des nécessités qui ne sont que conventionnelles. Il ne l’est plus du tout lorsque, ne se

contentant pas de s’approprier le bien d’autrui sans nécessité véritable, il cherche, en outre, à discréditer et à ridiculiser sa victime, tel Tartufe voulant mettre le bonhomme Orgon hors de chez lui.

Les plagiaires ne sont pas des voleurs ordinaires ; ils n’ont pas l’excuse de la faim, même s’ils vivent de leur plume, car ils pourraient et ils devraient vivre d’autre chose, s’ils voulaient tenir leur plume avec toute la dignité désirable. (Voir Gens de Lettres). Les nécessités de l’homme de lettres, ou de celui qui se prétend tel, sont toutes conventionnelles et de l’ordre de la vanité ou de la cupidité. C’est par vanité ou pour s’enrichir, le plus souvent pour les deux, et non parce qu’ils ont faim, que tant de geais déshonorent la profession des lettres en se parant des plumes du paon.

« Il est assez de geais à deux pieds comme lui,

Qui se parent souvent des dépouilles d’autrui,

Et que l’on nomme plagiaires »

a dit La Fontaine. Dans la plupart des cas, ils sont simplement indélicats et leur faute est d’autant plus vénielle qu’elle ne tarde pas à être découverte et à leur rapporter plus de ridicule qu’ils n’en ont tiré de considération. Comme le geai de la fable, le plagiaire de cette sorte se voit :

    « …………… bafoué,
        Berné, sifflé, moqué, joué,
Et par messieurs les paons plumé d’étrange sorte. »

Ceux-là sont les simples plagiaires, trop simples pour être très malfaisants, qui se bornent à « coudre dans leurs rapsodies de longs passages d’un bon livre avec quelques petits changements » (Voltaire.) Mais il y a ceux qui ne se contentent pas de se parer des plumes du paon et se permettent de les tailler, de les arranger, de les adapter à leur façon, défigurant ainsi malignement les auteurs qu’ils ont dévalisés. Ceux-là ajoutent à l’indélicatesse la muflerie ; ils pratiquent un véritable banditisme artistique. Ce sont des tripatouilleurs et des vandales. (Voir Tripatouillage et Vandalisme.) Ils sont d’autant plus méprisables que leurs supercheries les font réussir auprès du public ignorant ou indifférent. Ils trônent parfois à l’Académie, sont des « chers maîtres » dans les revues et les journaux, pontifient dans les assemblées littéraires et artistiques. Or, il y a au bagne quantité de gens qui n’ont pas fait pire qu’eux et sont certainement plus excusables.

Le plagiat était, dans le droit romain, le crime de « celui qui débauchait ou recélait des esclaves, achetait sciemment une personne libre, ou enlevait des enfants » (Bescherelle). Le plagiaire (plagiarus, de plaga, plaie, coup) était condamné au fouet pour avoir commis le crime de plagiat. Martial, satirique romain, ayant fait un rapprochement entre le plagiaire et celui qui méritait le fouet de l’opinion publique pour s’être approprié les pensées d’autrui, il semble qu’il y ait eu là l’origine de l’application des mots plagiat et plagiaire à la friponnerie littéraire et, par extension, à celle de l’art. Car cette sorte d’industrie s’exerce aussi dans les beaux arts et les arts appliqués. Les Pierre Grassou, dont Balzac a conté la fortune, abondent dans le monde de la peinture, et il est plus facile de gagner des millions en pillant chez un musicien une quelconque Ramona qu’en s’appropriant une œuvre littéraire. Le plagiat est plus difficile à déceler en art qu’en littérature.

Michelet a fait un des derniers emplois du mot plagiaire, suivant la définition antique, en appelant ainsi les Jésuites qui enlevaient les enfants à leurs mères. (Du prêtre et de la femme.) Le crime de plagiat, dans le sens du droit romain, a disparu de la loi moderne depuis la suppression légale de l’esclavage. Il ne sub-