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AVERTISSEMENT. Xiij


mable à certains égards, bigarré par un mélange de très-bonnes et de très-mauvaises choses, ne soit un de ceux qui aura contribué le plus à la fatale révolution qui se fait dans les idées humaines.

Il m’a donc paru que c’étoit rendre un service essentiel à la religion, aux lettres, à la vérité de l’histoire, que de donner un Dictionnaire assorti à l’usage et au goût des personnes qui, par leur attachement aux bons principes, sont fâchées de trouver dans un livre d’un si grand usage une multitude de jugemens calomnieux, inconséquens, contradictoires. Le chef de la société de gens-de-lettres a lui-même senti la nécessité de ce projet. Il a compris que tout ouvrage rédigé par une société, à moins de supposer des circonstances singulièrement rares et bien difficiles à réunir, ne pouvoit être qu’un assemblage monstrueux (*[1]) ; que des gens-de-lettres imbus de principes différens, attachés à des systèmes opposés en fait d’histoire, en fait de physique, en fait de morale, en fait de politique, en fait de théologie, etc., ne pouvoient nous donner

  1. (*) C’est à tort que M. Diderot a fait de l’Encyclopédie l’humiliante critique qu’on lit dans les Mémoires de M. Luneau de Boisgermain (voyez le Journ. hist. et litt. 1er. Oct. 1779, p. 180). Dès le moment que c’étoit l’ouvrage d’une société, cette énorme compilation ne pouvoit manquer d’avoir tous les défauts que M. Diderot lui reproche. Que seroit-ce d’un bâtiment que cent architectes auroient combiné et dirigé sur des goûts et des modèles différens ? A cela ajoutez l’espèce d’incognito que gardent la plupart de ces gens-de-lettres, qui les dérobe en quelque sorte au jugement du public, et les laisse jouir en paix des petits artifices, par lesquels ils l’ont dupé. Mais supposé qu’ils fussent tous bien connus, les choses n’en iroient pas mieux. Aucun ne se croit responsable des défauts d’un ouvrage qui les regarde tous. Les plus jaloux de leur réputation s’excusent sur les autres : la plupart ne se mettent pas même en peine de se justifier ; la partie de la besogne qui leur est échue, étant confondue dans la masse de l’ouvrage, ils croient avoir autant de droit de se glorifier des bonnes choses que leurs collègues y ont insérées, que de ne pas rougir des sottises qui leur appartiennent en propre.