Page:Fenelon - Aventures de Telemaque suivies du recueil des fables, Didot, 1841.djvu/180

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
163
LIVRE viii.

la terre pour se communiquer aux mortels, sans doute qu’ils ont pris de telles figures d’étrangers et de voyageurs.

Cependant on arrive dans le temple de Jupiter, qu’Idoménée, du sang de ce dieu, avait orné avec beaucoup de magnificence. Il était environné d’un double rang de colonnes de marbre jaspé ; les chapiteaux étaient d’argent. Le temple était tout incrusté de marbre, avec des bas-reliefs qui représentaient Jupiter changé en taureau, le ravissement d’Europe, et son passage en Crète au travers des flots : ils semblaient respecter Jupiter, quoiqu’il fût sous une forme étrangère. On voyait ensuite la naissance et la jeunesse de Minos ; enfin ce sage roi donnant, dans un âge plus avancé, des lois à toute son île pour la rendre à jamais florissante. Télémaque y remarqua aussi les principales aventures du siège de Troie, où Idoménée avait acquis la gloire d’un grand capitaine. Parmi ces représentations de combats, il chercha son père ; il le reconnut, prenant les chevaux de Rhésus que Diomède venait de tuer ; ensuite disputant avec Ajax les armes d’Achille devant tous les chefs de l’armée grecque assemblés ; enfin sortant du cheval fatal pour verser le sang de tant de Troyens.

Télémaque le reconnut d’abord à ces fameuses actions, dont il avait souvent ouï parler, et que Nestor même lui avait racontées. Les larmes coulèrent de ses yeux. Il changea de couleur ; son visage parut troublé. Idoménée l’aperçut, quoique Télémaque se détournât pour cacher son trouble. N’ayez point de honte, lui dit Idoménée, de nous laisser voir combien vous êtes touché de la gloire et des malheurs de votre père.

Cependant le peuple s’assemblait en foule sous les vastes portiques formés par le double rang de colonnes qui environnaient le temple. Il y avait deux troupes de jeunes