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Page:Fenelon - Aventures de Telemaque suivies du recueil des fables, Didot, 1841.djvu/302

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LIVRE xiii.

Cette colonie, qui était venue fonder Tarente, était composée de jeunes hommes nés pendant le siège de Troie, qui n’avaient eu aucune éducation : leur naissance illégitime, le dérèglement de leurs mères, la licence dans laquelle ils avaient été élevés, leur donnaient je ne sais quoi de farouche et de barbare. Ils ressemblaient plutôt à une troupe de brigands qu’à une colonie grecque.

Phalante, en toute occasion, cherchait à contredire Télémaque ; souvent il l’interrompait dans les assemblées, méprisant ses conseils comme ceux d’un jeune homme sans expérience : il en faisait des railleries, le traitant de faible et d’efféminé ; il faisait remarquer aux chefs de l’armée ses moindres fautes. Il tâchait de semer partout la jalousie, et de rendre la fierté de Télémaque odieuse à tous les alliés.

Un jour, Télémaque ayant fait sur les Dauniens quelques prisonniers, Phalante prétendit que ces captifs devaient lui appartenir, parce que c’était lui, disait-il, qui, à la tête de ses Lacédémoniens, avait défait cette troupe d’ennemis ; et que Télémaque, trouvant les Dauniens déjà vaincus et mis en fuite, n’avait eu d’autre peine que celle de leur donner la vie et de les mener dans le camp. Télémaque soutenait, au contraire, que c’était lui qui avait empêché Phalante d’être vaincu, et qui avait remporté la victoire sur les Dauniens. Ils allèrent tous deux défendre leur cause dans l’assemblée des rois alliés. Télémaque s’y emporta jusqu’à menacer Phalante ; ils se fussent battus sur-le-champ, si on ne les eût arrêtés.

Phalante avait un frère nommé Hippias, célèbre dans toute l’armée par sa valeur, par sa force et par son adresse. Pollux, disaient les Tarentins, ne combattait pas mieux du ceste ; Castor n’eût pu le surpasser pour