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LIVRE xv.

ber dans son sang, où il se roulait, et ses cheveux, aussi beaux que ceux d’Apollon, traînés dans la poussière.

Philoctète, ayant vaincu Amphimaque, fût contraint de se retirer du combat ; il perdait son sang et ses forces ; son ancienne blessure même, dans l’effort du combat, semblait prête à se rouvrir et à renouveler ses douleurs : car les enfants d’Esculape, avec leur science divine, n’avaient pu le guérir entièrement. Le voilà prêt à tomber dans un monceau de corps sanglants qui l’environnent. Archidame, le plus fier et le plus adroit de tous les Œbaliens qu’il avait menés avec lui pour fonder Pétilie, l’enlève du combat dans le moment où Adraste l’aurait abattu sans peine à ses pieds. Adraste ne trouve plus rien qui ose lui résister, ni retarder sa victoire. Tout tombe, tout s’enfuit ; c’est un torrent, qui, ayant surmonté ses bords, entraîne, par ses vagues furieuses, les moissons, les troupeaux, les bergers et les villages.

Télémaque entendit de loin les cris des vainqueurs, et il vit le désordre des siens, qui fuyaient devant Adraste comme une troupe de cerfs timides traverse les vastes campagnes, les bois, les montagnes, les fleuves même les plus rapides, quand ils sont poursuivis par des chasseurs. Télémaque gémit, l’indignation paraît dans ses yeux : il quitte les lieux où il a combattu longtemps avec tant de danger et de gloire. Il court pour soutenir les siens ; il s’avance tout couvert du sang d’une multitude d’ennemis qu’il a étendus sur la poussière. De loin, il pousse un cri qui se fait entendre aux deux armées.

Minerve avait mis je ne sais quoi de terrible dans sa voix, dont les montagnes voisines retentirent. Jamais Mars, dans la Thrace, n’a fait entendre plus fortement sa cruelle voix, quand il appelle les Furies infernales, la