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Page:Fenelon - Aventures de Telemaque suivies du recueil des fables, Didot, 1841.djvu/388

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LIVRE xv.

derrière un arbre, pour éviter la poursuite du jeune Grec. Alors celui-ci s’écrie : Dauniens, vous le voyez, la victoire est à nous ; l’impie ne se sauve que par la trahison. Celui qui ne craint point les dieux craint la mort ; au contraire, celui qui les craint ne craint qu’eux.

En disant ces paroles, il s’avance, vers les Dauniens, et fait signe aux siens, qui étaient de l’autre côté de l’arbre, de couper le chemin au perfide Adraste. Adraste craint d’être surpris, fait semblant de retourner sur ses pas, et veut renverser les Crétois qui se présentent à son passage ; mais tout à coup Télémaque, prompt comme la foudre que la main du père des dieux lance du haut de l’Olympe sur les têtes coupables, vient fondre sur son ennemi ; il le saisit d’une main victorieuse, il le renverse comme le cruel aquilon abat les tendres moissons qui dorent la campagne. Il ne l’écoute plus, quoique l’impie ose encore une fois essayer d’abuser de la bonté de son cœur : il enfonce son glaive, et le précipite dans les flammes du noir Tartare, digne châtiment de ses crimes.

À peine Adraste fut mort, que tous les Dauniens, loin de déplorer leur défaite et la perte de leur chef, se réjouirent de leur délivrance ; ils tendirent les mains aux alliés, en signes de paix et de réconciliation. Métrodore, fils d’Adraste, que son père avait nourri dans des maximes de dissimulation, d’injustice et d’inhumanité, s’enfuit lâchement. Mais un esclave, complice de ses infamies et de ses cruautés, qu’il avait affranchi et comblé de biens, auquel il se confia dans sa fuite, ne songea qu’à le trahir pour son propre intérêt : il le tua par derrière pendant qu’il fuyait, lui coupa la tête, et la porta dans le camp des alliés, espérant une grande récompense d’un crime qui finissait la guerre. Mais on eut horreur de ce scélérat, et on