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Page:Fenelon - Aventures de Telemaque suivies du recueil des fables, Didot, 1841.djvu/478

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FABLES

de la reine. Alors il voulut se tuer. La fée arrêta le coup, et tâcha de le consoler. La reine, en expirant, lui dit : Quoique je meure de votre main, je meurs toute à vous. Alfaroute déplora son malheur d’avoir voulu, malgré la fée, un don qui lui était si funeste. Il lui rendit la bague, et la pria de lui ôter ses ailes. Le reste de ses jours se passa dans l’amertume et dans la douleur. Il n’avait point d’autre consolation que d’aller pleurer sur le tombeau de Clariphile.





VI. Histoire de Rosimond et de Braminte.




Il était une fois un jeune homme plus beau que le jour, nommé Rosimond, et qui avait autant d’esprit et de vertu que son frère aîné Braminte était mal fait, désagréable, brutal et méchant. Leur mère, qui avait horreur de son fils aîné, n’avait des yeux que pour voir le cadet. L’aîné, jaloux, invente une calomnie horrible pour perdre son frère : il dit à son père que Rosimond allait souvent chez un voisin, qui était son ennemi, pour lui rapporter tout ce qui se passait au logis, et pour lui donner le moyen d’empoisonner son père. Le père, fort emporté, battit cruellement son fils, le mit en sang, puis le tint trois jours en prison, sans nourriture, et enfin le chassa de sa maison, en le menaçant de le tuer s’il revenait jamais. La mère épouvantée n’osa rien dire ; elle ne fit que gémir. L’enfant s’en alla pleurant ; et ne sachant où se retirer, il traversa sur le soir un grand bois ; la nuit le surprit au pied d’un rocher ; il se mit à l’entrée d’une caverne sur un tapis de mousse où coulait un clair ruisseau, et il s’y endormit de lassitude. Au point du jour, en s’éveillant, il vit une belle femme, montée sur un cheval gris, avec une housse en broderie d’or, qui paraissait aller à la chasse. N’avez-vous point vu passer un cerf et des chiens ? lui dit-elle. Il répondit que non. Puis elle ajouta : Il me semble que vous êtes affligé. Qu’avez-vous ? lui dit-elle. Tenez, voilà une ba-