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tour de la pensée et du sentiment, Florent Wilson,malgré sa vie retirée, malgré son peu d’empressement à se faire un nom dans les lettres, a laissé une trace dans l’esprit des contemporains. Les deux petites pièces que lui adresse Gilbert Ducher[1] trahissent un sentiment qui n’est pas banal et lui parlent de religion en termes presque émus. Conrad Gesner, qui le vit à Lyon en 1540 (il y était depuis deux ou trois ans, au moins), en parle avec une estime très sentie et comme d’un jeune professeur du plus grand avenir[2].

Quelques années plus tard, Aneau, dédiant sa traduction francaise des Emblèmes d’Alciat au comte d’Aran en Écosse, invoque le patronage de « M. Florent Volusen, homme oultre la bonté des mœurs et vertus et la cognoissance des ars et sciences et choses bonnes et civiles, ayant aussi intelligence et faculté des régulières langues grecque et latine et des vulgaires écossoise sienne, françoise, italienne et espaignolle à luy acquises par fréquentation des nations[3] ».

Il avait publié, en 1539, chez Sébastien Gryphe, une Commentatio quædam theologica sive precatio tanquam in aphorismos dissecta[4], petit livre mystique qui fait deviner l’homme et qui le fait aimer : c’est une sorte d’Imitation, écrite par un humaniste de la Renaissance qui a suivi les leçons d'Érasme, qui a beaucoup lu, beaucoup vu et qui n’en éprouve que plus profondément le besoin de se retremper dans le silence de la prière et de s’y ressaisir lui-même. Il paraît qu’il professa au collège de Navarre; quoi qu’il en soit,en 1551 il était a Lyon, et on le fit sortir de sa chère retraite pour prononcer la fameuse oraison doctorale de la Saint—Thomas. Il mourut à Lyon en 1557, d’après l’épitaphe touchante que lui consacra le prince des poètes de son pays, Buchanan.

Telles sont, dans le cercle même de Gilbert Ducher, les premières et les plus étroites relations que notre jeune professeur ait entretenues pendant son séjour à Lyon et conservées plus tard, du moins les seules sur lesquelles nous ayons

  1. P. 43 et 50.
  2. Conrad Gesner, Bibliotheca, éd. de 1545, p. 245.
  3. Emblèmes d’Alciat, de nouveau translatez en françois, vers pour vers, jouxte les latins, p. 3. — Lyon. Guillaume Roville et Macé Bonhomme, in-8, 1549.
  4. Réimprimée à Bâle chez Jérôme Curion, 1544.