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nous le verrons, ne se trouvent dans aucune de ces deux langues ? Qu’y a-t-il de si extraordinaire dans le fait d’une langue modifiée, altérée, presque perdue, mais dont le noyau primitif, et reconnaissable encore, se révèle parfois à l’observateur tenace ? Que répondraient nos adversaires en face d’une loi ou d’une institution wallonne qui n’a d’analogue nulle part ? Iraient-ils encore, bon gré mal gré, compulser les Novelles et le Code pour en retrouver le germe, et par suite d’un engouement dont on a fait justice[1], nier le moyen âge et conclure à l’influence de Rome sans Rome ? Pour nous, qui croyons que les barbares, nos ancêtres, n’ont pas été tout à fait exclus du privilége d’avoir des idées créatrices, nous sommes convaincu que cette loi et cette institution, comme le langage, ne doivent s’expliquer que par le peuple qui les a vus naître ; que Rome n’a pas le mot de l’histoire du monde et particulièrement de la nôtre ; qu’enfin, le wallon est bien un reste de cette nation éburonne que César a pu vaincre mais non détruire, et qui a pu tout perdre, hors ses bardes. D’ailleurs, d’autres considérations viennent à l’appui de cette idée ; comme nous l’a dit fort bien M. Jacob Grimm, toute langue primitive est nécessairement peu riche ; le nom-

  1. On va peut-être aujourd’hui un peu trop loin, témoin ce savant de Berlin, Ernest Jœker, qui a publié un ouvrage traitant De l’origine germanique de la langue latine et du peuple romain ; Breslau, 1830, in-8o. Par les mots qu’il cite et qui attestent une affinité surprenante entre l’allemand et le latin, on peut supposer que ces deux langues dérivent d’une souche commune, ou que le latin a donné naissance à l’allemand et réciproquement. M. Jœker rejette la première supposition comme inadmissible, et son opinion a quelque fondement.