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Les sermons qui se firent à Liége dans ces temps reculés, étaient toujours en wallon pour être mieux à la portée du peuple. C’est dans cet idiome qu’on lui expliquait la loi évangélique ou qu’on l’appelait aux Croisades. C’est du moins en wallon que lui adressaient la parole Notger en 972, et, comme cet évéque, St.-Bernard en 1131, Jean d’Alich en 1196, Lambert-le-Bègue en 1173, Olivier et Heriman en 1214, et d’autres prédicateurs célèbres dans les XIVe et XVe siècles[1]. C’était si bien la langue vulgaire, que, en 1451, le légat apostolique Nicolas Cusani ayant voulu s’immiscer dans les affaires du clergé, celui-ci refusa d’obéir, en alléguant que la bulle ne lui conférait, à lui légat, aucun pouvoir juridictionnel sur les Wallons; mais bien sur les Allemands[2].

De plus, c’est en wallon que nobles et roturiers, riches et pauvres, adressaient leurs prières à la Vierge Marie au XIIIe siècle. Au tribunal de la pénitence c’était encore le wallon qui était en usage. Enfin, ce qui résumera nos recherches, c’est l’existence de l’oraison dominicale, qui n’a jamais été et n’est encore récitée, dans beaucoup de localités, et surtout à Liége, qu’en wallon ; et s’il est un monument avéré de l’ancien idiome de nos pères, c’est assurément une prière aussi populaire, qui a dû conserver une immobilité incontes-

  1. Cf. D. Rivet : Hist. litt. de la France, t. XV, p. 611. — Gilles d’Orval, dans les Gest. Pontif. Leod. Script., t. II, p. 110. — Rupert, Adrien de Vieux-Bois, Zantfliet, dans Martène et Durand, Amplissima Collectio, t. IV, p. 1086, 1220, 1225 ; t. V, p. 50, etc.
  2. Quia non essent Alemanici, sicut dicebat Bulla ipsius, sed Gallici. — Foullon : Hist. Episc. Leod., t. II, p. 30.