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Page:Ferdinand Henaux - Études historiques et littéraires sur le wallon, 1843.djvu/46

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y avait impossibilité chez nous de mettre à exécution un pareil plan, quelque excellent que nous le reconnaissions. L’absence de matériaux en a été la cause. Force nous a été de composer plutôt des études historiques que des études littéraires, et, qui plus est, induire de ce qui est écrit ce qui n’est pas écrit, c’est-à-dire, voir dans un fait peu important en apparence, les traces les plus caractéristiques de l’idiome liégeois. Mais mieux que tout cela encore, il eût fallu des connaissances plus vastes et la patience, quand elle est le génie. Heureusement, à l’impossible nul n’est tenu : nemo impossibili tenetur. Nous faisons de ce principe de jurisprudence notre devise littéraire.

Remarquons d’abord que chez tous les peuples et à toutes les époques de l’histoire on a chanté : et à preuve, dit Borel[1], c’est que « Homère le Gregeois dit dans l’Odyssée que les dieux envoyent de grands accidents aux hommes afin qu’on en puisse faire des chansons. » C’est ainsi que se sont traduits d’abord les sentiments et les souvenirs des hommes. Qu’on remonte l’échelle des siècles et l’on verra le peuple toujours manifester sa joie par des couplets, ce qui suppose, quoi qu’on en dise, une certaine civilisation, du rhythme et du nombre dans les paroles.

La chanson ancienne (car le moyen âge est presque un déluge et le monde qui en est sorti est presque un nouveau monde), se divise en deux genres distincts : la chanson en langue vulgaire, destinée au peuple ; et la chanson en langue latine, cultivée exclusivement par les

  1. Trésor de Recherches et Antiquitez Gauloises et Françoises. Paris, 1655, in-4º. V. la préface.