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se prononce manhon ; femm, famm ; drap, drèp. À l’ouest de Liège, à Ans, par exemple, la prononciation diffère encore. On y substitue en général l’â à l’a simple : effan se prononce effâ. C’est le contraire dans le quartier d’Outre-meuse : la prononciation y est âpre, rude, fortement gutturale. L’esprit satirique populaire a même inventé un exemple burlesque pour faire sentir cette différence. À Liége on dit : On blankih à St. D’nih pò lez moh k’on chi dri l’ouh. Outre-meuse rend cette phrase de cette manière : On blankik à St. D’nik, pò lez mok k’on chi dri l’ouk. Là, on dit colon (pigeon) ici colank ; et cette substitution de l’a à on se reproduit ordinairement.

Pour établir la division territoriale des langues, on a considéré souvent, comme on sait, les diverses manières dont un pays prononçait le mot oui. Ce principe nous est, assurément, applicable, et l’on pourrait sans peine le poser comme point de départ, fixe et précis, des subdivisions de notre pays, et les noter sur une carte géographique. Ce travail serait curieux et utile, car le wallon pourrait ainsi être classé en plusieurs dialectes principaux : d’un autre côté, les résultats en seraient inévitablement fructueux, car il servirait peut-être à distinguer les limites certaines des anciennes peuplades qui couvraient notre soi.

À Liège et dans ses environs on dit awè, en faisant entendre un son très-sec. Dans le marquisat de Franchimont oyî qu’on prononce lentement ; à Verviers cependant on dit, d’un ton languissant : aye. En Hesbaye oui se traduit par oyé, et en Condroz par ayè. Cette distinction a toujours existé, paraît-il, car elle est consignée dans des documents du XVe siècle.