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essence du christianisme

nécessaire à sa vie. L’homme est réjoui par le rayon indifférent de l’étoile la plus éloignée. L’homme seul a des joies pures, intellectuelles, désintéressées. Le regard, qui se perd dans la contemplation du ciel étoilé et dans l’admiration de cette lumière qui n’a rien de commun avec la terre et ses besoins, y voit sa propre nature, sa propre origine. L’œil est d’une nature céleste ; ce n’est que par son secours que l’homme s’élève au-dessus de son séjour ici-bas. C’est pourquoi la science commence lorsque les regards se dirigent pour la première fois vers le ciel. Les premiers philosophes étaient astronomes. Le ciel rappelle à l’homme sa destination, c’est-à-dire qu’il n’est pas né seulement pour agir, mais encore pour contempler.

L’être absolu, le Dieu de l’homme, c’est l’être même de l’homme. De la même manière la puissance exercée par un objet sur lui n’est pas autre chose que la puissance même de sa nature intime. L’homme dont l’être est susceptible d’être affecté par les sons est dominé par le sentiment, au moins par le sentiment qui trouve dans les sons l’élément qui lui correspond. Mais ce n’est pas le son par lui-même, ce n’est que le son plein de sens et de sentiment qui peut faire impression sur l’homme sensible ; c’est-à—dire le sentiment n’est produit que par ce en quoi il est contenu, il n’est déterminé que par lui-même, que par son essence, et ainsi il en est de la volonté, ainsi de la raison. Nous ne pouvons avoir conscience de rien sans avoir en même temps conscience de nous-mêmes, rien affirmer sans nous affirmer aussi, et comme vouloir, pouvoir, sentir sont des perfections, des réalités essentielles, il est impossible que nous puissions sentir ou juger avec la