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essence du christianisme

source de toutes les comparaisons ; incommensurable, parce qu’elle est la mesure des mesures ; elle ne peut être subordonnée à aucun autre être plus élevé ni être rangée dans aucune espèce de choses, parce qu’elle est le principe suprême de toute classification. Les définitions que les philosophes spéculatifs et les théologiens donnent de Dieu comme de l’être en qui l’existence et l’essence sont inséparables et en qui les attributs et le sujet sont identiques ne renferment que des déterminations empruntées à l’essence de la raison.

L’intelligence ou la raison est enfin l’être nécessaire. La raison est parce qu’il n’y a que l’existence de la raison qui est raison, parce que s’il n’y avait aucune raison, aucune conscience, tout ne serait rien, l’être serait égal au néant. C’est la conscience seule qui établit une différence entre l’être et le non-être ; c’est en elle que se révèle la valeur de la vie, la valeur de la nature. Pourquoi y a-t-il en général quelque chose ? Pourquoi un monde ? par la simple raison que si quelque chose n’existait pas, ce serait le rien qui existerait ; que s’il n’y avait pas de raison il n’y aurait que non raison. Le monde existe donc parce que c’est une absurdité que le monde n’existe pas. Dans le non-sens de sa non-existence tu trouveras le vrai sens de son existence ; dans le manque de fondement de l’idée qu’il n’existe pas la vraie raison pour laquelle il existe. Le néant est sans signification et sans but ; l’être seul a un but et un sens. Il y a de l’être parce que l’être seul est raison et vérité. Être est le besoin absolu et l’absolue nécessité. Quel est le fondement de l’existence qui a le sentiment d’elle-même, de la vie ? le besoin de la vie. Mais à qui est-ce un besoin ? à ce qui ne vit pas. Ce