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LA RELIGION

tière dans le sacrifice, et par là se manifeste à nous de la manière la plus sensible. L’origine du sacrifice, c’est le sentiment de notre dépendance, c’est-à-dire la crainte, le doute, l’incertitude du succès l’inquiétude de l’avenir, le remords d’une faute commise ; mais le résultat, le but du sacrifice, c’est le sentiment de nous-mêmes, c’est-à-dire le courage, la jouissance, la certitude du succès, la liberté et le bonheur. Le sentiment de notre dépendance, voilà le fondement ; mais la destruction de cette dépendance, la conquête de la liberté, voilà le but de la religion. Ou bien : La divinité de la nature est la base de toutes les religions, y compris le christianisme, mais la divinité de l’homme en est le but final.

XXV

La religion suppose le contraste, la contradiction entre vouloir et pouvoir, entre désir et réalisation, intention et réussite, imagination et réalité, pensée et être. Dans la volonté, le désir, l’imagination, l’homme est illimité, libre, tout-puissant, dieu ; dans la réalité, au contraire, lorsqu’il s’agit pour lui d’atteindre le but de ses désirs et de ses efforts, là il se heurte partout contre des obstacles sans nombre ; en un mot, il est homme, c’est-à-dire un être borné, tout le contraire de Dieu. « L’homme propose et Dieu dispose. » Ma pensée et ma volonté m’appartiennent ; mais ce que je pense et ce que je veux est en dehors de moi,