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IX
PRÉFACE

dèle de cette critique banale, convenable et ennuyeuse, que l’Académie, les journaux bien pensants et l’Université nous servent depuis trente années. Que d’autres y cherchent des idées, des principes, une conviction quelconque : pour moi, je n’y trouve qu’une forte somme de prose convenablement distribuée dans un nombre voulu de feuilles d’impression. On croirait qu’il nous a simplement rapporté ce qu’il a entendu dire chez les bourgeois de la Germanie conservateurs et piétistes qui l’invitaient à prendre le thé chez eux. Lui demander un jugement sur Feuerbach, c’est interroger Cousin sur Proudhon ou Auguste Comte, ou Nicolardot sur Voltaire. On peut rencontrer du talent chez les éclectiques, rationalistes, spiritualistes, qu’ils soient ou non tout cela à la fois, et M. Taillandier en est la preuve ; mais la vraie science, mais la vérité, jamais !

Dans les sciences en général, on ne se permet de rien affirmer sans avoir pesé auparavant chacune de ses paroles. L’amour du vrai étant le seul mobile des recherches, le mensonge est presque impossible, parce que chacun sait que le contrôle ne se fera pas attendre. Il en est tout autrement dès qu’il s’agit de questions dans lesquelles l’intérêt, l’esprit de parti, le caractère, le genre d’éducation, sont les facteurs de la pensée. Là on peut dire sans crainte : Dis-moi à quelle espèce de lecteurs tu t’adresses, et je saurai qui tu es. Il est des gens qui ne lisent jamais que ce qui est d’accord avec leur manière de voir toute d’habitude et de convention, et d’autres qui les servent à souhait. Ces deux