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HENRI ESTIENNE.

vre classiques, de plus en plus recherchés, tributaire d’un pays étranger. Presque tous les auteurs latins avaient été déjà remis en lumière : il s’appliqua donc à écarter la rouille dont les avaient entachés plusieurs siècles d’oubli ; et, pour cette seule littérature, on ne lui dut pas moins de quatre-vingts réimpressions importantes. En outre il en donna la clef dans un livre d’une érudition et d’un labeur immenses, son Trésor de la langue latine, bien digne de ce nom, puisque, les écrivains de Rome fussent-ils perdus sans exception, on retrouverait tout leur idiome dans l’ouvrage de Robert. Car il ne se borna pas à y exposer avec scrupule le sens général des mots ; il y fixa avec précision ces nuances délicates que leur avait ajoutées le goût sûr et délié des meilleurs esprits. Depuis on n’a pu mieux faire qu’en prenant ce vocabulaire pour base et pour guide des travaux du même genre.

Mais ce fut surtout pour la publication des textes grecs et orientaux que Robert ouvrit une nouvelle et large voie à la typographie française. Là-dessus aussi, des voisins, placés alors à la tête de la civilisation européenne, avaient pris sur nous les devants, nous laissant la gloire de perfectionner leurs travaux. Les Italiens firent particulièrement usage, dès 1481, de l’impression en caractères grecs. Quelques années plus tard Alde Manuce, et après lui son fils et son petit-fils, lui donnèrent de grands développements à Venise[1] : elle ne fut introduite chez nous qu’au com-

  1. Jusqu’à eux onze volumes seulement avaient été imprimés en lan-