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MARGUERITE DE NAVARRE

héroïque par excellence, celui qui devait être, d’après les règles des maîtres, affecté aux grands sujets. Joignant l’exemple au précepte, Ronsard en fit usage dans sa Franciade.

Le Portrait du vrai chrétien et la Complainte pour un détenu prisonnier, remplis de pures aspirations et de souvenirs bibliques, méritent encore d’être signalés parmi les poésies religieuses de Marguerite, dont plusieurs ont été rassemblées sous ce titre singulier : Le Miroir de Marguerite de France, reine de Navarre, « auquel elle voit son néant et son tout. » Elle-même sollicitait au début l’indulgence du lecteur, qu’elle invitait

À s’arrêter sans plus à la matière,
En excusant la rime et le langage,
Voyant que c’est d’une femme l’ouvrage ;

Et il est vrai que cette partie est plus riche en bons mouvements et plus édifiante qu’elle n’est remarquable sous le rapport littéraire. Ce ne sont guère que centons composés de fragments des psaumes, des prophéties et de l’Ancien comme du Nouveau Testament. À peine en peut-on extraire çà et là quelques vers ; telle est cette apostrophe à la Mort :

Ô Mort, par vous j’espère tant d’honneur
Qu’à deux genoux, en cri, soupir et pleur,
Je vous requiers : venez hâtivement
Et mettez fin à mon gémissement…
Ô douce Mort, par cette amour venez
Et, par amour, à mon Dieu me menez…