Page:Feugère - Les Femmes Poètes au XVIe siècle, 1860.djvu/145

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
121
MARGUERITE DE NAVARRE

Mentionnons encore comme assez bien frappés ces vers que, selon le poëte, l’Arbre de la croix semble faire entendre :

Je suis la vérité et la vie et la voie ;
Mort n’a plus de pouvoir en quelque part que soie.
Les pécheurs seulement la trouveront cruelle,
Mais les miens l’aimeront et la trouveront belle.
Par moi l’horrible mort est belle devenue,
Et les portes d’enfer n’ont contre moi tenue ;
Car au milieu d’enfer me trouve le fidèle.
Qui suis son paradis et sa joie éternelle.

Nous terminerons nos citations par la pièce de ce recueil la meilleure à notre gré ; et, comme elle exprime parfaitement le goût de spiritualité et d’allégorie propre au temps et à l’auteur, nous la donnerons presque en entier :

 Un jeune veneur demandait
 À une femme heureuse et sage
 Si la chasse qu’il prétendait
 Pourrait trouver, n’en quel bocage,
 Et qu’il avait bien bon courage
 De gagner cette venaison
 Par douleur, mérite et raison.
 Elle lui a dit : Mon seigneur,
 De la prendre il est bien saison ;
 Mais vous êtes mauvais chasseur.

 Elle ne se prend par courir,
 Ne par vouloir d’homme du monde.
 Ne pour tourment, ne pour mourir ;
 Et si ne faut point que l’on fonde
 Son salut, fors qu’au Créateur.