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MADEMOISELLE DE GOURNAY.

que peu le mouvement d’idées et l’immense progrès qui s’accomplissait, les germes puissants qui s’élaboraient, que dis-je ? les chefs-d’œuvre qui naissaient devant elle. Il semblait qu’une baguette magique l’eût endormie au sein du triomphe de la Pléiade, dont elle s’était obstinée ensuite à porter le drapeau délaissé. Mais les opinions humaines se détrônent entre elles ; et, dans leur cercle mobile, on revient souvent à celles dont on s’était éloigné. De nos jours il y a eu, par la lassitude du genre classique (je veux parler du mauvais), un retour vers quelques idées de la renaissance. M. Sainte-Beuve, à la fin de son intéressant travail sur la poésie du seizième siècle, cite d’Aubigné, Régnier et aussi mademoiselle de Gournay, outre les poëtes de la Pléiade, comme offrant, dans certains passages de leurs écrits, des points généraux de ressemblance avec les doctrines qui ont caractérisé la jeune école littéraire de 1830.

La longue carrière de mademoiselle de Gournay l’avait fait survivre à presque tous ses amis et ses illustres protecteurs. À ceux que nous avons déjà nommés il faut ajouter le chancelier de France Séguier, Louis de Chasteigner, les présidents de Grammont et Jeannin, les évêques de Poitiers et de Nantes, La Rochepozai et Godeau, les ducs de Mantoue et de Biron, enfin plusieurs princes et princesses. Car jadis, comme nous l’avons rappelé d’après Tallemant des Réaux, « elle avait vu le beau monde. » Elle nous a même fait savoir que Henri IV, fort bienveillant à son égard, relevait vivement ceux qui se permettaient de