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Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 1, 1948.djvu/160

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Scène II

Samuel, Baloche, puis Gratin

Baloche, entrant du fond, en habit et cravate blanche. — Eh bien ?…

Samuel, toujours allongé, sur le même ton, — Eh bien ?

Baloche. — Eh ! bien ? Monsieur le Maire ?

Samuel, même jeu. — Eh bien ! Monsieur le maire… ce n’est pas moi.

Baloche, — Je sais bien que ce n’est pas vous ! mais nous l’attendons.

Samuel, même jeu. — Eh bien, attendez-le !

Baloche. — Il y a toute ma noce à la mairie ! nous ne pouvons pas nous marier sans lui.

Samuel, se soulevant. Oh ! Voyez-vous, mon garçon ! il ne faudrait pas nous parler de noces aujourd’hui ! Nous sortons d’en prendre. (Se recouchant.) Allez vous coucher !

Baloche. — Mais enfin, monsieur, puisque c’est pour aujourd’hui.

Samuel. — Eh bien ! vous repasserez demain ! (Se soulevant.) Vous n’avez pas honte d’être pressé comme ça ! En voilà un noceur !

Il se recouche.

Baloche. — Ah ! Mais il m’ennuie !

Gratin, entrant. — Pardon ! M. le maire, s’il vous plaît ?

Samuel. — Encore un autre. Ah ! çà ! c’est une gageure ! Qu’est-ce que vous voulez… vous ?

Baloche, à Gratin. — Pardon, monsieur : mais je suis occupé avec monsieur.

Gratin. — Oh ! un mot seulement. (À Samuel.) Voulez-vous dire à M. Charançon que c’est un de ses anciens camarades de droit, M. Gratin, actuellement commis voyageur en jarretières, et de passage à Valfontaine qui veut lui parler…

Samuel. — Oui ! Eh bien ! revenez plus tard : nous ne sommes pas visibles.

Gratin. — Ah ? bien ! je reviendrai…

Samuel — C’est ça ! et vous aussi.

Baloche. — Ah ! c’est trop fort ! mais enfin, je vous somme…

Samuel, perdant patience. — Oh ! mais c’est vous qui m’assommez. Allez, allez ! demain. Aujourd’hui, la mairie est fermée

Baloche. — Je me plaindrai.

Il sort furieux, par le fond.

Gratin. — Au revoir !…

Ils sortent.

Scène III

Samuel, puis Édouard

Samuel. — Au revoir ! ils sont étonnants ces gens-là ! ils n’ont donc pas sommeil. (Il s’étend de nouveau sur le canapé, les yeux fermés, sommeillant.) Ah ! je sens que je dors debout ! Ah ! petites actrices !… bon !…

Il s’endort, Édouard paraît au fond, tenant une valise qu’il dépose sur une chaise en entrant ; il regarde un instant autour de lui comme s’il cherchait quelqu’un à qui parler, puis descend en scène, va à la porte de gauche et frappe.