été le coup de foudre ! Depuis huit jours je m’attache à vos pas ! Vous l’avez remarqué.
Lucienne, s’arrêtant devant la table. — Mais non, monsieur.
Pontagnac. — Si, madame, vous l’avez remarqué ! Une femme remarque toujours quand on la suit.
Lucienne. — Ah ! quelle fatuité !
Pontagnac. — Ce n’est pas de la fatuité, c’est de l’observation.
Lucienne. — Mais enfin, monsieur, je ne vous connais pas.
Pontagnac. — Mais moi non plus, madame, et je le regrette tellement que je veux faire cesser cet état de choses… Ah ! Madame…
Lucienne. — Monsieur !
Pontagnac. — Ah ! Marguerite !
Lucienne, s’oubliant. — Lucienne, d’abord !
Pontagnac. — Merci ! Ah ! Lucienne !
Lucienne. — Hein ! Mais, monsieur, je vous défends !… Qui vous a permis ?…
Pontagnac. — Ne venez-vous pas de me dire comment je devais vous appeler !
Lucienne. — Enfin, monsieur, pour qui me prenez-vous ? Je suis une honnête femme !
Pontagnac. — Ah ! tant mieux ! J’adore les honnêtes femmes !…
Lucienne. — Prenez garde, monsieur ! Je voulais éviter un esclandre, mais puisque vous ne voulez pas partir, je vais appeler mon mari.
Pontagnac. — Tiens ! vous avez un mari ?
Lucienne. — Parfaitement, monsieur !
Pontagnac. — C’est bien ! Laissons cet imbécile de côté !
Lucienne. — Imbécile ! mon mari !
Pontagnac. — Les maris des femmes qui nous plaisent sont toujours des imbéciles.
Lucienne, remontant. — Eh bien ! vous allez voir comment cet imbécile va vous traiter ! Vous ne voulez pas sortir ?…
Pontagnac. — Moins que jamais !
Lucienne, appelant à droite. — C’est très bien !… Crépin !…
Pontagnac. — Oh ! vilain nom !…
Lucienne. — Crépin !…
Scène II
Les Mêmes, Vatelin
Vatelin. — Tu m’appelles ? ma chère amie…
Pontagnac, à part. — Vatelin ! fichtre !
Vatelin, reconnaissant Pontagnac. — Ah ! tiens ! Pontagnac ! ce cher ami !
Lucienne. — Hein !
Pontagnac. — Ce bon Vatelin !
Vatelin. — Ca va bien ?
Pontagnac. — Mais très bien !
Lucienne, à part. — Il le connaît.
Elle descend à gauche, quitte son chapeau et le pose sur le canapé.