Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 2, 1948.djvu/175

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de Vatelin qui, pendant toute cette scène, est très préoccupé et cherche à diverses reprises à se rapprocher de la porte de droite. Soldignac, un bras sous le sien, lui fait faire une petite promenade. — Figurez-vous que j’étais venu à cet hôtel pour un rendez-vous avec une personne qu’elle n’a pas pu m’attendre et qu’elle me priait de loui excuser.

Vatelin, dont l’esprit est ailleurs. — Oui, oui, oui.

Soldignac. — Elle a dou aller soigner son mère très malade. (S’arrêtant et le regardant.) Ca vous intéresse pas que je vous dis ?

Il lui a quitté le bras.

Vatelin, semblant sortir d’un rêve. — Beaucoup ! je vous suis ! Vous disiez : "Malade", je suis très content !… Vous êtes malade ?…

Soldignac. — Qui ?

Vatelin. — Vous !

Soldignac. — No, pas moa,… elle !…

Vatelin. — Ah ! elle !

Soldignac. — Yes !… la mère.

Vatelin. — Ah ! la mère !… la vieille dame, c’est bien ça, elle est malade.

Soldignac. — Alors, que faire ?… Mon Dieu, me direz-vous, vous pouvez vous en aller…

Vatelin, le faisant remonter vers la porte. — Hein ! Vous en aller ? mais comment donc ! allez ! allez donc ! Ne vous gênez pas pour moi !

Soldignac, descendant à gauche. — Aoh ! no ! no !… c’est un hypothèse !

Soldignac pose sa canne près de la cheminée.

Vatelin. — Ah ! c’est une hypothèse. (À part.) C’est dommage (Haut.) non, je disais ça parce que je sais qu’en général vous êtes d’un naturel pressé.

Soldignac. — Aoh ! yes ! le jour, mais le soir, j’ai toujours le temps !

Il s’allonge sur le fauteuil.

Vatelin, à part. — Eh bien ! ça va être gai !

Soldignac. — No ! M’en aller, je pouis justement pas. Comme je savais que je serais cet soir à l’hôtel, j’y avais donné rendez-vous au commissaire de police.

Vatelin, tombant sur la chaise près de la table. — Au commissaire de police !

Soldignac. — Bien oui !… vous savez bien que je fais pincer ma femme cet soir.

Vatelin, à part. — Mon Dieu ! Est-ce qu’il se douterait ? (Haut.) Elle n’est pas ici ! Elle n’est pas ici !…

Soldignac. — Qui ! Ma femme ? Je sais bien, elle est rue Roquepaïne.

Vatelin, se levant. — Ah ! oui, oui (À part.) Il ne sait rien !

Soldignac. — Le commissaire doit être en train de la surprendre en ce moment.

Vatelin, il remonte vers la porte de droite. — Oui, oui, oui, oui.

Soldignac, se levant. — Pour plus de sûreté, il la fait filer depuis ce matin. Ca ne vous intéresse pas ce que je vous dis ?…

Vatelin, allant à lui. — Si ! si ! si !… Vous me disiez : "Malade… elle est malade…"

Soldignac. — Aoh ! no, plus maintenant.

Vatelin. — Ah ! elle est morte !… C’est toujours un pas de fait !…