Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 6, 1948.djvu/240

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Mittwoch. — Non, je dis pas en marche, je dis c’est "en marche", les bords blancs d’une page.

Serge. — Oui, oui, en marge.

Paulette. — Ah ! bon.

Mittwoch. — Eh ! bien, c’est ce que je dis : "en marche".

Serge. — Absolument.

Mittwoch. — Bien, tenez ! je suis très content que la situation soit aussi nettement établie, parce qu’alors ça me permet de ne pas mettre des gants et d’aborder tout de suite la chose pour ça en somme que je suis venu. (A Paulette.) Il s’agit d’une occasion pour toi, un service pour moi et une affaire pour tous les deux.

Serge, par discrétion, remonte légèrement.

Paulette. — Ah ! quoi donc ?

Mittwoch, à Serge qui redescend. — Je me suis toujours intéressé, beaucoup à Paulette. C’est moi qui l’ai faite, pas vrai ?

Paulette. — C’est vrai

Mittwoch. — Elle était dactylographe, elle était jeune et jolie, alors je l’ai lancée.

Serge. — Vous !

Mittwoch : — Oui, je fais toujours ça, je les cherche dans la fleur, je les nippe, je les lance et alors une fois lancée, n’est-ce pas, on trouve toujours un imbécile pour les prendre avec vous.

Serge. — Je vous remercie, monsieur Mittwoch.

Mittwoch. — Oh ! les présents sont toujours exceptés. (A Paulette.) Alors donc, voilà ! j’ai quelqu’un pour toi.

Paulette. — Pour moi ?

Serge, se levant avec un geste d’humeur. — Monsieur Mittwoch….je vous en prie !

Mittwoch. — Eh ! bien quoi, puisque c’est fini ; vous deux ! Vous pensez qu’elle va redevenir vierge ? Il faut être philosophe.

Serge. — C’est possible, mais devant moi…

Mittwoch. — Qu’est-ce que ça peut vous faire… Ah ! si vous auriez, encore été ensemble, certes, jamais je ne me serais permis… j’aurais attendu que nous soyons seuls. Mais maintenant…

Serge, vexé. — C’est juste ! allez ! allez ! vous avez raison.

Paulette. — Voyons, mon petit, tu dois pourtant bien comprendre certaines choses… Tu n’aimes pas mieux que j’agisse carrément, nettement devant toi, plutôt que d’aller en cachette… comme avant ! Est-ce que ce n’est pas te donner une preuve d’amour ?

Serge. — Mais oui, mais oui.

Mittwoch. — Eh bien voilà ! Je disais j’ai quelqu’un pour toi. Il s’agit d’un personnage très considérable, parce qu’enfin on dit toujours, mon tripot, mon claquedents, la belle Hellène, n’empêche qu’il y vient les plus grosses notabilités. Celui-là, alors, c’est le summum ! Il doit déjà deux cent quarante mille francs à la caisse, c’est te dire…

Paulette. — Deux cent quarante mille francs ?

Mittwoch. — Mais ce n’est pas assez ! nous serions très embêtés s’il nous réglait et se tirait des pattes. — Alors j’ai pensé à une chose.

Paulette. — Ah ! quoi ?

Mittwoch. — Le duc, l’autre jour, t’a remarquée à la dernière réunion d’Auteuil.

Paulette. — Le duc ! quel duc ?