Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 6, 1948.djvu/262

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Isidore, se débattant. — M. le comte ! Madame ! Monsieur le comte !

Paulette. — Eh ! bien, quoi ?

Serge, qui a déposé les bouteilles sur la table, bondissant vers le couple, saisissant Isidore par le bras et le faisant pirouetter, ce qui. renverse à moitié Paulette sur la chaise-longue. — Oh ! tonnerre !

Paulette, furieuse de cette bousculade. — Oh ! ben, voyons !

Serge. — Polisson !… voulez-vous foutre le camp ! Voulez-vous foutre le camp !

Isidore. — Oui, monsieur ! oui, monsieur !

Paulette. — Ah ! çà ! tu es fou !

Mittwoch. — Voyons, mon cher comte…

Serge. — Foutez-moi la paix !

Isidore. — Qu’est-ce que je disais à madame ? qu’est-ce que je disais que monsieur le comte…

Serge. — Voulez-vous me foutre le camp !

Isidore. — Oui, monsieur.

Il sort précipitamment à droite.

Serge. — Oh ! oh ! oh !

Paulette. — Ah çà ! qu’est-ce qui te prend, toi ?

Serge. — Comment ?

Paulette. — De quoi te mêles-tu ? Est-ce que tu vas venir te jeter dans mes jambes et me mettre des bâtons dans les roues ?

Serge. — Comment, quand je trouve ce larbin sur tes genoux !

Paulette. — Larbin ! on t’en donnera des larbins de ce prix-là ! En quoi diffère-t-il donc de toi, si ce n’est qu’il a cent millions et que toi tu n’as plus le sou ?

Serge. — C’est bien à toi de me le reprocher.

Paulette. — Enfin, est-ce vrai ? alors quoi, tu n’as pas l’intention de continuer à m’entretenir, n’est-ce pas !

Serge. — Tu sais très bien que je ne peux pas !

Paulette. — Eh ! bien, alors, ne te mêle donc pas de mes actes et laisse-moi diriger ma vie comme il me plaît.

Serge. — Tout de même, être remplacé par ton domestique…

Paulette. — Eh ! si ce n’est que ça, je ne le garde pas. Il n’est plus à mon service. Je suis correcte.

Mittwoch. — D’ailleurs, quoi ? un domestique ! c’est l’habit qui fait le moine ; habillé comme vous et moi, où est la différence ?

Paulette. — Mais dame !

Mittwoch. — Et alors, déshabillé…

Paulette. — Oui.

Mittwoch. — Il faut le savoir.

Paulette. — Enfin, voyons ! ce matin, tu étais raisonnable ! Tu t’étais rendu à l’évidence…

Serge. — Tu as raison ! Je me suis laissé encore emballer. J’ai eu tort.

Mittwoch. — Voilà, vous avez eu tort.

Serge. — Ah ! vous, je ne vous demande pas votre avis.

Mittwoch. — Ah ! pardon !

Serge. — Je n’ai pas le droit d’être une entrave dans ta vie. Va, rappelle Isidore. Va…

Paulette. — Tu devrais le rappeler toi-même. Après la bousculade de tout à l’heure, un mot de toi, ça lui fera plaisir.

Serge. — Soit ! je vais le sonner.