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Arnold, faisant manœuvrer son poignet endolori, pendant que Robin va rejoindre le Proviseur. — Ah ! nom d’un chien ! Ces Anglais, ça n’est pas plus haut que la botte, ça vous décroche déjà le bras ! (Au moment où le proviseur est sur le point de disparaître avec Robin.) Ah ! Monsieur le Proviseur ne me donne pas un reçu ?

Le Proviseur. — De quoi ?

Arnold. — Du petit.

Le Proviseur, moqueur. — Un reçu du petit ! Non ! non ! Ce n’est pas encore dans nos usages.

Arnold. — Ah ! bon, bon, simple renseignement ! du moment que je m’en rapporte ! .. Je m’en rapporte.

Sortie du Proviseur et de Robin.

Scène IV

Arnold, puis Chandel

Arnold, redescendant en cascadeur, son melon sur la tête.- Et maintenant, ohé !… ohé !… Les patrons en voyage, le gosse au bahut ! Eh ! allez donc !

Il esquisse un pas de danse sur un air à la mode.

Chandel, arrivant du fond et après avoir considéré un moment Arnold avec étonnement. — Eh ! bien, qu’est-ce que vous avez, Monsieur ?

Arnold, se retournant. — Monsieur ?

Chandel. — C’est la danse de Saint-Guy ?… (Reconnaissant Arnold.) Ah !

Arnold. — Quoi ? (Reconnaissant Chandel.) Ah ! Emile Chandel !

Chandel. — Bastien Toudoux !

Arnold. — Mon pays !… Qu’est-ce que tu fais là ?

Chandel. — Eh bien ! et toi ?

Arnold - Eh ! bien, tu vois.

Chandel. — Et moi aussi.

Arnold. — T’est donc ici ?

Chandel. — Je suis maître d’études.

Arnold. — T’es maître ? Ah tiens ! Moi, je suis domestique ! (Lui tendant la main.) Bah ! on n’en est pas plus fier.

Chandel, lui serrant la main. — Comment donc ! D’autant que pour ce qui est de moi… Quel sale métier !

Arnold, avec intérêt. — C’est vrai ?… Bien, pourquoi le fais-tu ? Sais-tu ! prends le mien. (Généreusement.) Veux-tu que je te trouve une place ?

Chandel, souriant avec un sentiment de sa supériorité. — Non, merci, je… je veux être magistrat.

Arnold, qui n’y voit pas grande différence. — Ah ! c’est autre chose.

Chandel, même jeu. — Oui. Il faut choisir.

Arnold, avec un certain lyrisme. — Dire que moi aussi, j’ai failli ne pas être domestique. Je voulais être jockey.

Chandel. — Qu’est-ce qui t’en a empêché ?

Arnold, bien simple. — Je ne sais pas monter à cheval.

Chandel. — Ah ! c’est une raison.